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Histoire

Depuis 80 ans, La Cimade a adapté son action aux enjeux de l'époque. À partir de la fin des années 70, La Cimade s’implique de plus en plus en réaction aux projets de loi réduisant les droits des immigrés.

Les origines

Les années 30 et la seconde guerre mondiale

Dans les années 30, l’Europe est en détresse. L’œuvre perverse du nazisme atteint des sommets. La pensée protestante, en France comme en Allemagne, n’est pas inactive devant les prémices de la tragédie.

Roland de Pury, pasteur à Lyon, analyse en juillet 1933 dans la revue Foi et Vie « la crise de l’Église allemande et la révolution nationale-socialiste. »

Les synodes protestants de Barmen (près de Wuppertal), en 1934, poussent un cri de détresse et s’élèvent contre une prédication de l’Église aux ordres de l’État et contre la mise au pas du protestantisme allemand avec le slogan « un peuple, un empire, un chef. »

le pasteur Martin NiemöllerMartin Niemöller, à l’origine de l’Église confessante en Allemagne, écrivait en 1935 : « Lorsqu’ils ont arrêté les communistes, je n’ai pas élevé la voix ; lorsqu’ils ont interné les juifs, j’ai gardé le silence ; lorsqu’ils s’en sont pris aux sociaux-démocrates, je me suis tu … Lorsqu’ils sont venus me prendre, il n’y avait plus personne pour me défendre. » Il est mis à la retraite par le pouvoir et milite ensuite en faveur de la paix.

Dietrich Bonhœffer, pasteur et théologien protestant, lutte dès 1933 contre « la clause aryenne » qui exclut de la communauté ecclésiale les Chrétiens d’origine juive. Il est exécuté par les nazis en 1945. Sa théologie est centrée sur le rôle du Chrétien dans un monde sécularisé.

Le pasteur Marc Bœgner, Président de la Fédération protestante depuis 1929, axe ses conférences de Carême en 1939 sur le thème « L’Évangile et le racisme. » Il prit la défense des juifs auprès du gouvernement de Vichy : Pétain, Darlan, Laval… Il fut coprésident du Conseil Œcuménique des Églises.le Professeur Karl Barth

Le pasteur Pierre Maury, Président de la « Fédé » (Fédération Française des Associations Chrétiennes d’Étudiants), écrivit : « Si les jours viennent où les exigences de l’État français sont inacceptables, souvenez-vous qu’il vaut mieux obéir à Dieu qu’aux hommes. »

En juillet 1939, se tient la Conférence mondiale de la jeunesse chrétienne à Amsterdam. De nombreuses rencontres œcuméniques, internationales, ouvertes sur les questions sociales, suivent. Les jeunes chrétiens protestants sont nourris par le débat intellectuel et le partage des idées avec le mot d’ordre de Karl Barth « La journée doit commencer avec une Bible dans une main et le journal dans l’autre. »

avisdevacuationNKarl Barth écrit en décembre 1939 une Lettre aux protestants de France : « Si Jésus soutient, console et encourage son Église, c’est pour qu’elle soit son témoin. C’est précisément en vue de ce témoignage que la grâce lui est faite de voir. Elle ne saurait donc se contenter d’observer les évènements de façon passive, bouche bée. Si la communauté chrétienne gardait le silence et si elle observait le cours des évènements en simple spectatrice, elle perdrait sa raison d’être. »

Septembre 1939 voit l’invasion de la Pologne et l’entrée de la France dans la guerre. Suzanne de Dietrich, Secrétaire générale de la FUACE (Fédération Universelle des Associations Chrétiennes d’Étudiants) présenta un rapport sur ce que vivaient les alsaciens lorrains évacués dans les départements du centre et du sud de la France. Elle s’adressa au Comité Inter-Mouvements de jeunesse (le CIM), réunissant Éclaireurs Unionistes, Unions Chrétiennes de Jeunes Gens et de Jeunes Filles et Fédé, en vue de « témoigner de l’amour du Christ. »

Le 18 octobre 1939, à Bièvres, les dirigeants du CIM, créent la CIMADE (Comité Inter-Mouvements Auprès Des Évacués) pour venir en aide, notamment, aux populations évacuées d’Alsace et de Lorraine, au nombre de 200.000 environ. Des équipes sont constituées (d’où le terme d’équipiers encore en usage aujourd’hui) qui accomplissent un travail à la fois d’évangélisation et social auprès des évacués alsaciens. Madeleine Barot, appelée et soutenue par Marc Bœgner, est Secrétaire générale de La Cimade, pendant toute la durée de la guerre et au-delà, Violette Mouchon (Commissaire nationale EU) étant présidente.

La Cimade entre dans les camps puis organise une résistance

Le régime nazi développe le système de l’internement administratif des juifs et des ennemis du régime. Plus de 40 000 internés (juifs étrangers notamment et réfugiés politiques opposants au régime nazi) sont recensés dans les camps d’internement et centres d’accueil du Ministère du travail dès 1940 : Gurs, Agde, Argelès, Rivesaltes, Aix, Brens… . La Cimade entra dans les camps. Elle s’y occupait des problèmes matériels comme des besoins psychologiques et spirituels. Dans les camps, «l’activité culturelle et cultuelle surgissait comme une protestation de vie. »

Madeleine Barot, secrétaire générale de La CimadeEn novembre 1942, les forces allemandes franchissent la ligne de démarcation. Le Comité de La Cimade ne peut plus se réunir. La Cimade passe alors d’une présence de solidarité à la résistance. Elle camoufle des gens, aide à traverser des frontières et constitue des états civils et des faux papiers. Un petit secrétariat est organisé 47 rue de Clichy. Madeleine Barot, énergique, organisatrice, crée un réseau de partenaires (Quakers, Croix-Rouge, …) avec lequel elle négocie la création de centres d’accueil de La Cimade pour sortir des internés des camps et les sauver de la mort : Le Coteau fleuri  au Chambon-sur-Lignon (avec les pasteurs Trocmé, Theiss), le foyer Marie Durand à Marseille, le foyer YMCA de Toulouse, et d’autres encore dans le Tarn ou près de Tarascon. Suzanne de Dietrich et le pasteur Visser’t Hooft (Secrétaire général du CŒ) organisent des rencontres et La Cimade apporte son témoignage de réalités occultées et difficiles à appréhender. Cela conduit aux thèses du groupe de Pomeyrol en 1942, traitant notamment, des rapports de l’Église et de l’État, du respect des libertés individuelles, de l’antisémitisme.  «  Tout en acceptant les conséquences matérielles de la défaite, l’Église considère comme une nécessité spirituelle la résistance à toute influence totalitaire et idolâtre. »

En juillet 1942 a lieu la rafle du vélodrome d’hiver. Il faut faire du chiffre ! La Cimade organise des évasions vers la Suisse, en relation avec le Conseil Œcuménique des Églises en création à Genève.

En novembre 1942, La Cimade installe son siège à Valence.

De nombreux villages alsaciens, presque entièrement protestants, sont accusés d’être pro-allemands. C’est le cas d’Oberhoffen où quatre baraques sont installées pour loger des familles et les équipiers Cimade.

« Ce n’est pas la charité que nous avons exercée pendant la guerre, du moins pas seulement ; nous avons voulu exprimer notre solidarité avec les victimes. » (Madeleine Barot).

Des années 50 à 80, l’accueil des immigrés

Installés dès la fin des années 50 au cœur des quartiers populaires des grandes villes, les équipes de La Cimade proposent un accueil et des actions pour répondre aux besoins des immigrés qui arrivent en nombre: parler et écrire le français, mais aussi disposer de possibilités de loisirs et d’activités qui favorisent une meilleures insertion dans la société d’accueil.

Les processus de décolonisation ont eu un impact sur le missions que se donne La Cimade. Celle-ci s’engage politiquement, travaille aux côtés de ceux qui édifient les jeunes nations, mais vient aussi en aide à ceux qui en font les frais, aux laissés pour compte de l’histoire…Cette façon d’être « des deux cotés » marque, aujourd’hui encore, l’esprit du mouvement.

À la fin des années 60, le nombre de réfugiés augmente dans le monde. Alors que le contexte économique est plutôt favorable en Europe, les pays signataires de la Convention de Genève se décident à élargir le droit d’asile aux non-européens. En France, les associations s’organisent pour accueillir cet afflux de réfugiés politiques.

Dans les années 60 à 80 la Cimade lance des partenariats dans des projets de coopération et de développement qui font évoluer ses actions et ses réflexions.. Dispensaire et centre ophtalmologique à Dakar, projets agricoles, médicaux, de formation, en Palestine, en Haïti, au Mali, en Amérique latine..

L’après 80

L’accueil de migrants et des réfugiés interpelle La Cimade sur les rapports Nord-Sud. cette prise de conscience la rend solidaire des mouvements de libération dans les dictatures du tiers-monde et elle apporte son soutien à ceux qui défendent les droits de l’homme et le justice sociale.

Les permanences juridiques alimentent le quotidien de la solidarité. C’est par ces interventions concrètes pour l »égalité des droits que s’exprime l’engagement des bénévoles. cette présence aux côtés des migrants et des réfugiés permet aussi à La Cimade de repérer les injustices, d’en témoigner et de mobiliser l’opinion publique.

Nombreux dans les prisons, les étrangers y connaissent plus de difficultés à exercer leurs droits : des bénévoles assurent une présence dans de nombreux établissement pénitentiaires. dans les lieux de rétentions administratives, La Cimade apporte une expertise juridique, une écoute, un soutien. Ces missions permettent également de témoigner de ce qui se passe dans les lieux d’enfermement.

Dans les années 2000, le contrôle des frontières est devenu le mot d’ordre de l’Union européenne. elle pousse les pays de départ et de transit à endosser un rôle de grade-frontière. Des acteurs de la société civile de ces pays tampons, avec La Cimade, cherchent à défendre les droits des migrants et des réfugiés aux portes de l’Europe.

Aujourd’hui,  plus de 70 ans d’engagement aux côtés des étrangers

La Cimade a été fondée en 1939 au sein des mouvements de jeunesse protestants. De sa mission initiale auprès des « évacués » de l’Alsace-Lorraine fuyant l’avancée nazie, elle a conservé son nom (dont la signification d’origine est « Comité Inter-Mouvements Auprès Des Évacués »), mais aussi un lien avec le monde protestant et surtout une fidélité aux valeurs et aux engagements de ses fondateurs.

Depuis plus de soixante ans, La Cimade a adapté son action aux enjeux de l’époque. Elle s’est engagée auprès des juifs menacés, a œuvré ensuite pour la réconciliation franco-allemande, s’est impliquée auprès des peuples du Sud en lutte pour l’indépendance et la décolonisation.

À partir de la fin des années 70, La Cimade s’implique de plus en plus en réaction aux projets de loi réduisant les droits des immigrés. La grève de la faim en 1981 et la marche pour l’égalité et contre le racisme renforcent le positionnement politique de l’association. Fidèle à ses principes, La Cimade entre dans les centres de rétention en 1984, pour y venir en aide aux étrangers reconduits. Tout au long de son histoire, La Cimade est restée un mouvement engagé sans se satisfaire d’une simple posture caritative.

Cette histoire dont le sens et l’exemple fondent nos engagements actuels, un groupe de bénévoles a choisi de la préserver, et de la mettre à disposition de ceux -membres de La Cimade, organismes partenaires, historiens- qui souhaitent y accéder dans le cadre de recherches précises ou par simple curiosité.

 

Pour en savoir plus, téléchargez le livret La Cimade. Une histoire. 80 ans.

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