Ils ont dû fuir, seuls, leur pays, avant leur majorité, alors juste âgés de 16, 17 ans. Leur voyage a été difficile. Malgré cela, ils se sont montrés courageux, très motivés à réussir leur scolarité, soutenus et appréciés par leurs camarades, leurs professeurs et leurs maîtres de stage. Ils ont trouvé un employeur prêt à les embaucher, avec lequel ils ont signé un contrat d’apprentissage.

Ces jeunes majeurs ont déposé leur demande de titre de séjour il y a plusieurs mois voire plus d’un an. En l’absence de réponse satisfaisante de vos services, une délégation de RESF 65 est venue vous présenter leurs situations et vous demander de leur accorder un titre de séjour d’un an, avec autorisation de travail. Ceci leur aurait permis d’accéder à une vie digne.

Nous attendions une réponse positive pour chacun d’eux. Or, lors de la rencontre, il a été annoncé à la délégation que, sur la dizaine de situations évoquées, cinq jeunes recevraient une obligation de quitter le territoire français (O.Q.T.F.) d’ici la fin de l’année scolaire. C’est d’une extrême violence !

De plus, des contradictions existent et elles sont d’importance :

– L’école de la République a formé ces jeunes, au nom du droit à l’éducation. Des professeurs se sont investis pour remplir leurs missions, et même au-delà. Les jeunes reconnaissent que sans le soutien de leurs enseignants, ils n’auraient pas tenu.

– Notre pays a investi dans leur formation pour qu’ils deviennent boulanger, maçon, charpentier, cuisinier, couvreur, peintre… Ce sont des secteurs d’activité où les artisans rencontrent des difficultés à recruter. Ils vous ont écrit d’ailleurs en ce sens.

– La ministre du travail a pris position et déclaré : “« Quand on accueille des mineurs non accompagnés qui s’engagent dans des formations, au bout de deux ans, si tout s’est bien passé, alors ils peuvent continuer à travailler en France ».

– Dans d’autres départements que le nôtre, des préfectures accordent le droit au travail pour les jeunes majeurs en apprentissage. Pourquoi pas dans les Hautes Pyrénées ? Vous allez régulariser un seul jeune majeur, pour honorer l’engagement pris par votre prédécesseur. Et vous en régularisez un second, car vos services ont découvert que ce jeune a été, à tort, déclaré majeur. Pour les autres, rien !

– La justice ne vous donne pas toujours raison ! Quelques jeunes ayant déjà reçu une OQTF ont pu se défendre et ont gagné. Dans deux jugements au moins, le juge a annulé l’OQTF délivrée sur l’argument du « défaut d’appréciation de l’intégration du jeune » dans la société française fait par la préfecture des Hautes Pyrénées,  l’enjoignant de délivrer un titre de séjour d’un an, avec autorisation de travail.

– Certains sont présents sur le territoire français depuis presque 4 ans. Ils sont là, soutenus par des associations, des enseignants, des employeurs et de nombreux citoyens d’ici. Ils sont parfaitement intégrés. Parmi tous ceux qui les connaissent, personne ne peut imaginer qu’ils soient contraints de repartir dans leur pays.

Pour nous, ces jeunes sont une richesse pour la France. Nous vous avions demandé d’appréhender la situation de ces jeunes avec humanité ! Aucun de nos arguments n’a été retenu…

Nous nous opposerons aux expulsions d’Alfousseyni, d’Alpha, d’Amara, d’Issa, de Vally. Pour eux et pour tous les autres jeunes dont nous connaissons le parcours et le courage, nous ne baisserons pas les bras !

Notre détermination à obtenir que ces jeunes puissent finir leur apprentissage, travailler dans les entreprises qui les attendent, continuer à vivre et travailler en Bigorre, ne faillira pas. Bien au contraire, elle se renforce, nourrie par la solidarité qui nous anime.

RESF avec l’ensemble des associations nationales de défense des droits est déterminé à mener ce combat jusqu’à l’obtention d’un titre de séjour avec droit au travail.

Nous demandons que :

– cesse la suspicion généralisée qui pèse sur ces jeunes dont les actes d’état-civil sont régulièrement contestés, alors que leur identité a été confirmée ;

– cesse l’exigence de documents impossibles à présenter pour obtenir un titre de séjour, à plus forte raison lorsque la réglementation ne les rend pas obligatoires ;

– cesse le blocage absurde des demandes de rendez-vous en préfecture, qui, sous prétexte de dématérialisation, revient à fermer des voies de régularisation.

– ces jeunes puissent avoir accès à des formations ou contrats d’apprentissage,  qu’ils puissent poursuivre les parcours engagés, et poursuivre la vie qu’ils ont entamée en obtenant un titre de séjour protecteur et stable ;

– soient régularisées les personnes étrangères présentes depuis plusieurs années sur notre territoire.

Veuillez recevoir, Monsieur le Préfet des Hautes Pyrénées, l’assurance de notre totale détermination.