Suite à cette opposition pacifique, la jeune femme a été séparée de son conjoint et de son bébé et descendue de l’avion. Aujourd’hui, elle est poursuivie pour « entrave à la circulation d’un aéronef » et son procès aura lieu le jeudi 17 janvier à 13h au tribunal correctionnel de Bobigny.
- Appel à mobilisation : RDV devant le tribunal de Bobigny le jeudi 17 janvier à 12h30 en solidarité et refus du délit de solidarité
- Appel à soutien en relayant ce témoignage ou en participant financièrement (voir appel à la fin du témoignage).
Une passagère qui s’exprime contre l’expulsion d’un étranger…
Je suis une jeune femme française, mon compagnon est arménien et nous avons une petite fille née en 2017. Voici le récit de ce qui nous est arrivé cet été. Dans cette histoire, nombreux sont les éléments qui ont leur importance mais s’ils devaient tous figurer dans mon témoignage, vous n’auriez peut-être pas le temps de tout lire. Aussi je vous propose un résumé qui présente ce qu’il me tient le plus à cœur de partager! Un artiste tourangeau qui souhaite rester anonyme a réalisé en soutien le dessin ci-dessous qui lui a été inspiré par mon récit.
Le lundi 30 juillet 2018, mon compagnon, notre fille et moi sommes montés à bord d’un avion d’Air France à destination d’Erevan (départ de Roissy prévu à 13h45). Nous devions passer nos premières vacances ensemble en Arménie et présenter notre bébé de presque quatorze mois à sa famille arménienne. Avant le décollage, j’ai dû changer la couche de notre bébé dans les toilettes de l’avion. De l’intérieur des toilettes j’ai entendu des cris. Puis en sortant avec la petite dans les bras, je me suis retrouvée face à une scène très violente: un homme maintenu par des policiers criait et se débattait et il portait sur la tête une sorte de casque de boxe noir qui recouvrait entièrement son visage! Très choquée et me demandant s’il s’agissait de l’expulsion d’un sans-papiers j’ai posé quelques questions. Les policiers ont essayé de me dissuader de « me mêler de ce qui ne me regardait pas », notamment en me disant que cet homme avait violé une mineure et que je ferais mieux de penser à ma fille. Je refusais malgré tout de retourner comme si de rien n’était à ma place et à un moment donné j’ai dit assez fort quelque chose comme: « il y a un homme attaché au fond de l’avion, c’est horrible! ». Alors les policiers m’ont expliqué que j’étais en état d’arrestation. Je les ai suivis comme ils me le demandaient à l’extérieur de l’avion. J’étais vraiment bouleversée et je pleurais. Quant à mon compagnon, qui m’avait d’abord suivie, avec le bébé, à l’extérieur de l’avion, j’ai fini par le convaincre de ne pas renoncer à ce voyage et tous deux sont remontés à bord.
Les policiers m’ont conduite à un commissariat et après qu’une autre policière ait pris ma déposition, je me suis retrouvée avec ma petite robe d’été, privée de mes affaires, dans une cellule de garde à vue relativement sordide où j’ai aussi passé la nuit. Au cours de cette garde à vue, j’ai été témoin des mauvaises conditions dans lesquelles ces policiers travaillent. D’autre part, j’ai pris conscience de la position vulnérable dans laquelle on se trouve quand on est prisonnier et de la souffrance que procure l’absence d’activité (relative dans mon cas puisque de ma cellule je voyais et j’entendais les personnes à l’accueil de la garde à vue). Le temps est passé extrêmement lentement. C’était d’autant plus perturbant qu’on m’avait dit au début que je sortirais sans doute le soir-même, puis le soir que je sortirais probablement le lendemain matin et en fin de compte ce n’est que le lendemain, le mardi 31 juillet, après le repas de midi que j’ai été transportée au Tribunal de grande instance de Bobigny où j’ai brièvement partagé la cellule d’une jeune femme (étrangère) avant d’être présentée à la procureure de la République. La cellule était entièrement carrelée, totalement isolée, avec une toute petite ouverture et la jeune femme n’avait même pas eu de matelas pour dormir ni de papier WC. Mais je crois que ce qui était encore pire pour elle c’était de ne pas avoir l’heure. Elle ne pouvait déduire l’heure qu’au moment des repas et quand je suis arrivée elle croyait/espérait qu’on était déjà le soir.
Lorsque j’ai retrouvé ma liberté (il devait être entre 16h et 17h), je tremblais, j’étais en état de choc. En plus en récupérant mon téléphone portable j’ai découvert que par une suite de malentendus mes parents me croyaient disparue et s’inquiétaient énormément!!
Par une étrange logique d’Air France, mon vol retour d’Erevan ne m’a pas été remboursé et j’ai finalement dû repayer le retour en plus de l’aller (que je n’ai effectué que le jour suivant car après la garde à vue j’étais dans un tel état nerveux que j’étais bien incapable d’effectuer un long voyage et puis je ne savais même pas si je voulais retenter ce voyage ni si je réussirais à me procurer l’argent nécessaire!).
MON PROCÈS POUR ENTRAVE A LA CIRCULATION D’UN AÉRONEF SE TIENDRA LE JEUDI 17 JANVIER 2019 A 13H00 AU TRIBUNAL CORRECTIONNEL DE BOBIGNY. En attendant je serais très contente si vous pouviez faire circuler mon témoignage et/ou participer à la collecte pour payer mes frais d’avocat qui s’élèvent à 2400 euros TTC.
Pour cela vous pouvez faire un chèque à l’ordre de LDH 37 avec au dos la mention « Solidarité Caroline » et l’envoyer à Ligue des Droits de l’Homme 37, 10 place Neuve, 37000 Tours.
Je vous remercie d’avance pour votre soutien quel qu’il soit!
Caroline