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la carte de résident de dix ans sur la sellette

16 avril 2014

Rendez-nous la carte de résident ! Manifeste pour un titre de séjour unique, valable 10 ans, délivré de plein droit À force de réformes du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda), de plus en plus d’étrangers et d’étrangères sont placés dans une situation […]

Rendez-nous la carte de résident !

Manifeste pour un titre de séjour unique, valable 10 ans, délivré de plein droit

À force de réformes du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda), de plus en plus d’étrangers et d’étrangères sont placés dans une situation insupportable : précarité des titres de séjour délivrés, délais interminables pour en obtenir le renouvellement même dans les cas où il est de plein droit, arbitraire d’une administration qui interprète les textes le plus restrictivement possible, conditions d’accueil déplorables dans les préfectures ….

La situation s’est dégradée à un point tel que les soutiens habituels ou les personnes qui sont en relation avec des immigré-e-s ne sont plus les seules à s’en émouvoir : en haut lieu aussi on commence à se préoccuper des retombées néfastes de la réglementation actuelle et de ses conditions d’application, comme en témoigne le rapport Fekl remis au gouvernement en mai 2013 1 . Pour sortir de cette situation, ce rapport préconise, comme s’il s’agissait d’une grande avancée, la création d’une carte « pluriannuelle », intermédiaire entre la carte temporaire d’un an et la carte de résident de dix ans. Mais pourquoi se contenter de cette demi-mesure ? Il y a trente ans, l’Assemblée nationale votait, à l’unanimité, la création de la carte de résident, valable dix ans et renouvelable de plein droit. Ce « titre unique de séjour et de travail » avait vocation à devenir le titre de séjour de droit commun pour l’ensemble de ceux et celles qui étaient installés durablement en France ou qui avaient vocation à s’y établir en raison de leurs attaches familiales ou personnelles. Les réformes successives ont détricoté ce dispositif, alors considéré, à droite comme à gauche, comme le meilleur garant de l’insertion – selon la terminologie de l’époque – des personnes concernées : c’est la carte de séjour temporaire qui fait aujourd’hui figure de titre de droit commun, tandis que l’accès à la carte de résident n’est plus qu’une perspective lointaine et aléatoire, soumise au bon vouloir de l’administration qui vérifie préalablement l’« intégration républicaine » des postulant-e-s.

N’ayons pas la mémoire courte : la loi du 17 juillet 1984 a été adoptée dans un contexte qui avait beaucoup de points communs avec celui d’aujourd’hui : le chômage de masse sévissait déjà, le Front national était une force politique montante et l’inquiétude quant à l’avenir n’était pas moindre. Pour des raisons essentiellement électoralistes, les gouvernements successifs ont mené des politiques systématiques de précarisation dont nous constatons chaque jour les effets dévastateurs.

Revenir à la carte de résident telle qu’elle avait été initialement instituée est une revendication nécessaire et réaliste. Les raisons mises en avant en 1984 pour réclamer et obtenir l’instauration de la carte de résident demeurent toujours valables aujourd’hui : simplification des démarches administratives, amélioration des conditions d’accueil dans les préfectures – et accessoirement des conditions de travail des fonctionnaires, mais surtout garantie de sécurité juridique indispensable pour pouvoir construire sa vie dans la société française.

Nous, organisations signataires, refusons qu’en 2014 les personnes étrangères qui ont construit leur vie en France soient maintenues dans l’insécurité d’un droit au séjour précaire. Nous voulons qu’il soit mis fin aux effets désastreux de cette précarité dans les domaines de l’activité professionnelle, de la vie familiale, de l’accès aux droits sociaux, à un logement, à un prêt bancaire…

Nous demandons que leur soit remis un titre de séjour pérenne, le même pour tous. Ce titre de séjour, créé il y a trente ans, existe encore dans la réglementation, même si les conditions de sa délivrance ont été progressivement dénaturées : nous réclamons le retour à la philosophie qui avait inspiré sa création et la rupture avec une politique aux conséquences injustes et inhumaines. La carte de résident, valable dix ans, doit à nouveau être délivrée et renouvelée de plein droit aux personnes établies en France, garantissant leur droit à y demeurer sans crainte de l’avenir.

1 Sécurisation des parcours des ressortissants étrangers en France, rapport au premier ministre par

Matthias Fekl, parlementaire en mission auprès du ministre de l’intérieur

 

9 avril 2014

Premières organisations signataires :

Les Amoureux au Ban public, la Cimade, la Fasti, le Gisti, le Secours catholique

Carte de résident : histoire d’un enterrement

La loi du 17 juillet 1984 a créé la carte de résident, donnant ainsi corps à une revendication ancienne portée depuis longtemps par les syndicats et le milieu associatif et réactivée à partir de 1982 par un collectif d’associations qui ont mené campagne pendant deux ans jusqu’à son obtention. Cette carte de résident, titre unique donnant à la fois droit au séjour et au travail, renouvelable de plein droit, avait été délivrée à tous les étrangers qui résidaient alors en France régulièrement depuis plus de trois ans. La loi avait prévu qu’elle serait aussi délivrée de plein droit, à l’avenir, à tous ceux qui avaient des attaches personnelles ou familiales en France : conjoints de Français, parents d’enfants français, conjoints et enfants d’un étranger lui-même titulaire d’une carte de résident, titulaires d’une rente d’accident du travail au taux supérieur à 20%, réfugiés statutaires, apatrides vivant depuis trois ans en France, étrangers en France depuis l’âge de 10 ans, ou y résidant habituellement depuis plus de quinze ans.

Depuis l’adoption de la loi de 1984, toutes les réformes – à l’exception de la loi Joxe de 1989 – ont eu pour objet et pour effet de remettre progressivement en cause ces acquis : d’un côté elles ont restreint la liste des catégories de personnes accédant de plein droit à la carte de résident, de l’autre elles ont subordonné cet accès à des conditions – d’ordre public, de séjour régulier, de durée de séjour préalable… – telles que la notion de « plein droit » n’apparaît plus que comme un faux semblant. La loi Pasqua du 9 septembre 1986, sans remettre frontalement en cause la reconnaissance d’un droit de demeurer en France fondé sur l’ancienneté du séjour ou sur les liens familiaux noués avec des citoyens français, a restreint la liste des étrangers pouvant prétendre de plein droit à la carte de résident. La seconde loi Pasqua de 1993 a subordonné la délivrance dite « de plein droit » de la carte de résident à la régularité préalable du séjour et à l’absence de menace pour l’ordre public ; les conjoints de Français n’ont plus eu accès à cette carte qu’après un an de mariage et à la condition, souvent difficile à remplir en pratique, d’avoir pu dans l’intervalle se maintenir sur le territoire français en situation régulière ; les personnes entrées en France avant l’âge de dix ans ont perdu la garantie d’obtenir le droit au séjour à leur majorité. Moins de quatre ans plus tard, le gouvernement a dû prendre acte de la situation inextricable dans laquelle se retrouvaient certains étrangers (conjoints de Français, jeunes entrés avant l’âge de dix ans…) : la loi Debré du 24 avril 1997 a donc prévu que puisse leur être accordée une carte de séjour temporaire.

La loi Chevènement de 1998 a assoupli la législation issue des deux lois précédentes en prévoyant la délivrance d’une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » à celles et ceux qui avaient des attaches en France sans pour autant remplir les conditions d’obtention d’une carte de résident. Mais elle a entériné par là même la précarisation de leur statut puisque certains des bénéficiaires potentiels de la carte « vie privée et familiale » obtenaient de plein droit, sous l’empire de la loi de 1984, une carte de résident.

Les lois Sarkozy de 2003 et 2006 ont mené jusqu’à son terme l’entreprise de déstabilisation commencée en 1986 en supprimant l’accès de plein droit à la carte de résident pour la quasi-totalité des catégories concernées. Mais surtout, elles ont posé en principe le maintien des étrangers dans une situation précaire aussi longtemps qu’ils n’ont pas donné des gages d’intégration, renversant ainsi le lien entre intégration et stabilité du séjour tel qu’il avait été pensé en 1984, la garantie de stabilité du séjour étant présentée comme une condition préalable et non la récompense de l’intégration.

Le mouvement de précarisation du droit au séjour engagé depuis 1993 a ainsi abouti à l’inversion de la hiérarchie des titres instaurée en 1984. La carte de résident avait vocation à être le titre de séjour de droit commun tandis que la carte de séjour temporaire devait être réservée aux étrangers venant en France pour une durée limitée ou ne remplissant pas les conditions requises pour obtenir la carte de résident ; désormais, c’est la carte de séjour temporaire qui est devenue le titre de droit commun, tandis que l’accès à la carte de résident est de plus en plus étroitement contrôlé et soumis à l’appréciation discrétionnaire du préfet

Auteur: Service communication

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