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Projet de loi asile et immigration 2023 : la menace à l’ordre public

Projet de loi asile et immigration 2023 : de la menace à l'ordre public à la menace sur les droits fondamentaux

ACTUELLEMENT

En l’état actuel du droit, certaines personnes étrangères sont protégées contre les mesures d’expulsion en raison de leur situation personnelle et familiale. Sont notamment «protégé∙e∙s», les parents d’enfant∙es français∙e∙s qui contribuent effectivement à l’éducation de leur enfant, les conjoint∙e∙s de Français∙e∙s qui vivent avec leur conjoint∙es depuis un certain temps, des personnes qui résident en France depuis l’âge de 13 ans ou moins, celles qui y résident depuis de longues années … Il ne s’agit pas d’une protection absolue car si l’administration considère par exemple que le «comportement» de la personne constitue «une menace grave à l’ordre public», elle peut prononcer contre elle un «arrêté d’expulsion». La menace à l’ordre public a ceci de particulier que les faits reprochés n’ont pas à faire l’objet d’une condamnation pénale. Elle reste donc sujette à l’appréciation arbitraire des préfectures. En revanche, l’arrêté d’expulsion étant une procédure longue et contraignante pour l’administration, cette dernière n’en prononce que quelques centaines par an.

QUE PROPOSE LE PROJET DE LOI ASILE ET IMMIGRATION ?

Le projet de loi, prévoit qu’un «comportement constituant une menace grave à l’ordre public» pourra aussi être utilisé pour prononcer une OQTF (Obligation de quitter le territoire français). Or les OQTF relèvent de procédures beaucoup plus simples. D’ailleurs, l’administration en délivre déjà plusieurs milliers par an.

ANALYSE DE LA CIMADE

La notion de menace à l’ordre public est floue et non définie. L’administration l’instrumentalise déjà largement, brandissant une menace future éventuelle pour refuser ou retirer un titre de séjour. Son utilisation pour prononcer des OQTF laisse présager une instrumentalisation décuplée qui permettrait de faire tomber les maigres protections contre l’expulsion. Cette mesure, inspirée par une politique du chiffre qui vise à expulser toujours plus, contribuerait à briser encore davantage de parcours familiaux et sociaux ancrés en France, au mépris des droits fondamentaux des personnes concernées

DANS LA VRAIE VIE

Arun T. est indien. Marié à Julie depuis plus de 3 ans, il n’a toujours pas réussi à obtenir une carte de séjour, faute de rendez-vous à la préfecture. Lors d’une manifestation pour le climat à Paris, il se protège des gaz lacrymogènes avec un foulard sur le
visage. La police l’arrête considérant que dissimuler son visage dans la manifestation constitue une menace
à l’ordre public et lui promet dans la foulée «une belle expulsion ». Mais c’est surtout de l’intimidation car en tant que conjoint de Française, Arun est protégé de l’expulsion et la menace à l’ordre public susceptible de faire «sauter» cette protection ne
peut être utilisée contre lui que dans le cadre d’un arrêté d’expulsion. Or l’administration ne souhaite pas entamer une procédure si contraignante et il est libéré au terme de la garde à vue. Si une mesure aussi simple qu’une OQTF avait pu être prononcée sur la base du même motif comme le propose le projet de loi, l’administration y aurait-elle renoncé?

📢 Dans ce contexte, La Cimade demande la fin de l’instrumentalisation de la menace à l’ordre public pour refuser un droit au séjour ou décider d’une expulsion.