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Afghanistan : l’urgence est là

20 juillet 2021

A l’heure où les talibans n’ont jamais été aussi proches de reprendre le pouvoir en Afghanistan, on refuse toujours de délivrer des visas aux membres des familles de ceux et celles qui ont malgré tout obtenu le statut de réfugié·e en France. Les personnes réfugiées afghannes s’inquiètent plus que jamais pour la sécurité de leurs familles.

AFGHANISTAN : L’URGENCE EST LÀ

L’Afghanistan est revenu à la une des journaux depuis le départ des troupes américaines et de l’OTAN.  Il se prépare à des heures sombres. Les Talibans ont mené une offensive fulgurante et ont encerclé les principales villes et des milliers de personnes se sont réfugiées dans les pays voisins. L’ambassadeur de France a enjoint aux Français et Françaises présent·e·s dans le pays de le quitter par un vol le 17 juillet 2021 qui a accueilli une partie du personnel afghan des institutions civiles et militaires françaises.

Face à cette catastrophe annoncée, quelle est la réaction des autorités françaises ?  Si elles ont délivré des visas au titre de l’asile à 600 personnes qui travaillaient pour la France depuis le mois de mai, elles laissent les familles des protégé·e·s par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) dans une impasse.

Blocage des visas de réunifications

Plus de 34 000 Afghan·e·s sont protégées par la France à la fin de l’année 2020. Pour une écrasante majorité, il s’agit de personnes qui souhaitent que leurs familles les rejoignent en sollicitant un visa de réunification familiale.

Depuis 2018, le traitement de ces demandes avait été transféré à l’ambassade de France au Pakistan. Déjà très longue et précédée d’une procédure dématérialisée, l’instruction de ces demandes a été arrêtée par le confinement et la consigne générale de ne plus délivrer des visas à ces familles, une décision qui a été suspendue en janvier puis annulée en juin 2021 par le Conseil d’Etat. A peine la possibilité de déposer une demande a été rouverte que l’ambassade à Islamabad, la capitale pakistanaise, a fermé pour des raisons de sécurité. Depuis si les ambassades en Iran et en Inde sont devenues compétentes pour les instruire, elles n’ont pas les moyens qui plus est rapidement de traiter les  3 500 dossiers dont 1 500 avaient deux ans d’ancienneté.

M.A ATTEND DEPUIS 4 ANS DE FAIRE VENIR SA FAMILLE EN FRANCE

M. A a été reconnu réfugié en mai 2017. Il est originaire de la province de Kapisa. Il souhaite faire venir son épouse et ses deux enfants. Sa famille tente de déposer une demande de visa à Kaboul mais n’est pas reçue car elle n’avait pas pris rendez-vous. C’est seulement en mai 2019 qu’elle parvient à la faire enregistrer à Islamabad. Le confinement bloque l’instruction de la demande. Malgré l’intervention de la décision du Conseil d’Etat, aucun nouveau rendez-vous est donné. Devant le tribunal administratif de Nantes qui a été saisi par son avocate, le ministère argue de la fermeture de l’ambassade pour ne pas statuer sur son recours. Cela fait donc plus de quatre ans que M. A n’arrive pas à faire venir sa famille.

👉 Il est urgent que le Gouvernement donne des instructions pour que ces demandes soient instruites et les visas délivrés aux familles.

Inquiétude sur la protection

C’est dans ce contexte dramatique qu’est intervenue une décision du Conseil d’Etat qui a rejeté le pourvoi formé contre une décision de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA).

En novembre 2020, la CNDA a rendu des décisions qui mettaient fin à la jurisprudence dite « Kaboul » en vigueur depuis mars 2018 qui considérait la capitale afghane comme une zone de violence d’intensité élevée par laquelle toute personne retournant en Afghanistan devait passer. Dans ses décisions, la CNDA considérait que la violence n’y était pas à un niveau tel qu’il faille octroyer systématiquement la protection subsidiaire.

Dès le 28 novembre 2020, deux chercheurs spécialistes de l’Afghanistan ont remis en cause l’appréciation de la Cour dans une tribune publiée dans le Monde. Au sein de la Cour, les avocats, les rapporteur·e·s voire les formations de jugement ont exprimé leur désapprobation. Cela n’a pas empêché la Cour de publier une carte affichant le niveau de violence dans son rapport d’activité et de réévaluer la situation dans certaines provinces du pays.

Le Conseil d’Etat a confirmé le 9 juillet 2021 cette décision controversée en suivant les conclusions de la rapporteure publique.

Qu’en sera-t-il à l’avenir? L’OFPRA a paradoxalement octroyé un peu plus de protections aux Afghans aux premier trimestre 2021 mais le taux d’accord a baissé de trois points par rapport au dernier trimestre 2020.

 

Près de 10 000 demandes sont pendantes devant l’OFPRA. Sachant qu’une grande part des Afghan·e·s demandant l’asile en France ont d’abord été Dubliné·e·s pour avoir déjà formulé une demande dans un autre Etat européen, et que le ministère de l’intérieur n’a de cesse de mettre fin à ces « mouvements secondaires », il n’est pas certain que le taux de protection reste au niveau actuel surtout si la guerre civile prend fin après la victoire des Talibans. On pourrait même imaginer que la protection subsidiaire qui est accordée en raison de cette guerre soit remise en cause.

Le retour d’une « migrerrance »

On pourrait alors voir réapparaitre le phénomène constaté dans les années 2000 et 2010. Un nombre important d’afghan·e·s présent·e·s en France en situation irrégulière et faisant l’objet de décisions d’expulsion qui ne peuvent être exécutées en raison de la situation sécuritaire, vivant dans les campements de Calais ou d’Ile-de-France, dans l’espoir de rejoindre une autre terre d’asile, comme le Royaume-Uni et être massivement placé·e·s en rétention comme cela avait été le cas en 2009.

C’est pourquoi nous demandons au gouvernement : 

  • De ne plus bloquer les visas des personnes afghanes
  • De mettre en place une procédure visant à réunir toutes les familles en attente de réunification dans un délai le plus bref possible

Auteur: Responsable national Asile

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