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Alerte : Risque de mise à la rue de plusieurs dizaines de familles exilées dans le Bas-Rhin

13 mars 2025

Convoquées en préfecture pour se voir proposer une « aide au retour », plusieurs dizaines de familles exilées vivant en France depuis de longs mois voire années risquent de se retrouver à la rue sans solution d’hébergement et de plonger dans la précarité.

Sur le territoire du Bas-Rhin, la préfecture a mis en place depuis plusieurs années un dispositif spécifique d’hébergement et d’accompagnement pour les familles dites « ménages aux droits incomplets (MDI) ». Ce dispositif visait à leur apporter une solution temporaire, en attendant qu’elles puissent obtenir une régularisation et accéder à un hébergement autonome.

Les équipes de La Cimade de Strasbourg et de Sélestat accueillent et accompagnent certaines de ces familles dans leurs démarches administratives en vue de l’obtention d’un titre de séjour stable. Certaines d’entre elles vivent en France depuis plusieurs années et y ont tissé et développé des liens amicaux, familiaux, scolaires, professionnels…

A Sélestat, nous suivons une famille qui vit en France depuis plus de 12 ans et qui est convoquée, à l’exception de la fille ainée qui est en situation régulière. L’unité familiale n’est pas respectée. Ce couple de trois enfants est parfaitement intégré, le père est bénévole depuis de nombreuses années dans une association caritative, a une promesse d’embauche dans le secteur du transport routier. La mère parle et écrit le français et leurs enfants suivent une scolarité régulière. Pour autant, aucune de leurs demandes de régularisation n’a abouti positivement, la dernière en date est devant la justice administrative. Cette famille est originaire d’un pays en guerre et ne peut y retourner sans risque.

Depuis plusieurs semaines, nos équipes bénévoles sont témoins d’une multiplication des convocations en Préfecture visant à mettre fin à l’hébergement de ces familles et à leur proposer comme unique perspective un départ volontaire forcé du territoire. Convoquées au pôle régional Dublin de la préfecture de Strasbourg, deux options leurs sont proposées sur un formulaire à signer : accepter d’être transférées au centre de préparation et d’aide au retour de Bouxwiller en vue d’une départ volontaire forcé du territoire ou refuser cette « offre d’hébergement ». Si elles refusent, la Préfecture indique qu’ « une fin de prise en charge sera prononcée », soit une mise à la rue.

Dans ce contexte, plusieurs dizaines d’hommes, femmes et enfants pourraient se retrouver à la rue sans solution d’hébergement, une situation qui risque d’accroître encore davantage leur précarité et de provoquer des ruptures dans leurs parcours de vie rendant encore plus difficile leur insertion dans la société française.

Au cours des dernières années, les évolutions politiques et législatives ont conduit à faire oublier que de demander un titre de séjour est un droit pour les personnes étrangères installées en France. Mais parvenir à déposer une demande de régularisation représente aujourd’hui un véritable parcours du combattant. Au-delà des interprétations préfectorales restrictives sur les régularisations de plein droit, s’ajoutent des entraves liées à l’accès au guichet pour toutes les démarches liées au séjour : Impossibilité de prendre rendez-vous ; impossibilité d’accéder aux guichets ; retards de renouvellement de titres de séjour qui engendrent des pertes des droits et de travail…A cela s’ajoute la dématérialisation des procédures d’accès à un titre de séjour qui a fermé les portes des services préfectoraux aux personnes étrangères[1]. Bugs techniques, couacs de conception, défaillances mettant en danger les personnes vulnérables, insuffisances et illisibilité de l’information sont autant d’obstacles qui fragilisent le quotidien des usagers et usagères du téléservice de demandes de titre de séjour[2].

La Cimade réaffirme sa solidarité active avec les personnes étrangères en situation de précarité et demande que la situation particulière de chacune des familles convoquées soit examinée avec attention et impartialité, que l’unité familiale soit respectée et que leur hébergement soit maintenu afin d’assurer le respect de leurs droits fondamentaux.

 

[1] Rue89 : Devant la préfecture du Bas-Rhin, des étrangers risquent l’expulsion par lenteur administrative, 7 mars 2025

[2] La Cimade : L’administration numérique pour les étrangers en France étrillée par le Défenseur des droits, 19 décembre 2024

Auteur: Région Grand Est

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