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Bobigny, Tribunal de Grande Instance, 17ème chambre correctionnelle

26 mars 2010

Témoignage d’une bénévole ayant participé à la campagne d’observation des audiences en comparution immédiate du tribunal de grande instance de Bobigny.

Pendant quatre mois, des observateurs bénévoles ont suivi les audiences en comparutions immédiates au Tribunal de Grande Instance de Bobigny. Ci-après le témoignage de l’une d’entre elles…

Bobigny, Tribunal de Grande Instance, 17ème chambre correctionnelle. Fin d’après-midi au mois d’octobre. Fait plutôt rare : une femme est dans le box des accusés. Extrêmement tendue, elle lance des regards furtifs à gauche, à droite.

« Madame xxx, vous êtes née le 11.02.1977, vous êtes de nationalité philippine.  On vous reproche d’avoir à l’aéroport de Roissy, alors que vous faisiez l’objet d’une obligation de quitter le territoire français, refusé d’embarquer à sept reprises.(…)  Vous comparaissez dans le cadre d’une procédure de comparution immédiate. Acceptez-vous d’être jugée aujourd’hui, ou souhaitez-vous  bénéficier d’un délai supplémentaire pour préparer votre défense ? » demande le juge-rapporteur à la jeune femme. L’interprète, se tient debout devant la vitre du box et traduit rapidement les propos du juge. « Oui » fait l’interprète en retour.

Les faits : Dix jours auparavant, elle s’était présentée avec un permis B litigieux.

À l’aéroport on lui refuse l’entrée sur le territoire. Quatre jours plus tard sa demande d’asile était rejetée. Depuis lors, elle a été présentée tous les jours à l’embarquement. Sept refus ont été comptabilisés. « Reconnaissez-vous les faits qui vous sont reprochés ?», demande le juge.

L’avocate, commise d’office, parvient à glisser que la prévenue était chaque fois dirigée vers Singapour. Elle vient de Manille, et ne connait personne à Singapour. De cette jeune femme,  on apprend aussi qu’elle a une fille et un mari à Manille. Qu’elle a tenté de rejoindre l’Europe après le typhon de septembre qui a ravagé sa maison. Aujourd’hui, elle voudrait se rendre à Milan où elle a de la famille. C’est l’enquête de personnalité qui révèle qu’elle a une amie en France qui est prête à l’accueillir.

La parole est donnée au procureur. Son réquisitoire est extrêmement court, peut être une minute. Il faut stopper l’immigration économique. Il demande trois ans d’interdiction du territoire français (ITF).
Au tour de l’avocate. Elle tente de capter l’attention du tribunal, pointe du doigt les agissements de la police aux frontières, la PAF, qui a délibérément précipité cette procédure. « Ma cliente comparait aujourd’hui devant vous, alors qu’elle aurait dû être présentée devant le JLD du Tribunal Administratif demain ». La Présidente du tribunal sursaute, vérifie et son agacement semble confirmer.

L’avocate tente à tout prix d’éviter l’ITF. Elle souligne que la prévenue aurait pu faire recours pour le rejet de la demande d’asile, qu’elle aurait pu être assignée à résidence chez son amie. Mais à présent sa cliente souhaite retourner à Manille. Le tribunal se retire après 25 minutes de débat.

Quelques dizaines de minutes d’attente, et la condamnation tombe : un an d’interdiction du territoire avec exécution provisoire.

Mireille Besnard

Auteur: Service communication

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