A la veille de la visite du ministre de l’Intérieur – annoncée mais finalement annulée – lundi 17 avril, à l’école de police de Oissel dans l’enceinte de laquelle est situé le centre de rétention administrative, nous relayons le communiqué de presse du réseau de visiteurs et observatoire du CRA.
Qui à Rouen connaît l’existence de ce centre de rétention ? Caché dans la forêt, derrière l’école de police, qui sait ce qu’est un centre de rétention ? Ce n’est pas une prison. Cependant les retenus nous disent que les conditions y sont pires !
Le réseau des visiteurs et observatoire du CRA a été créé fin 2019. Les nombreuses visites que nous rendons aux personnes retenues nous permettent d’être les témoins de ce qui se passe à l’intérieur. Nous y entendons le désespoir des personnes, leur colère, leur incompréhension face à cette situation.
Qui sont ces personnes : des personnes étrangères, sans papier les autorisant à rester sur le territoire français. Les préfectures appliquant plus qu’à la lettre les consignes du gouvernement actuel : expulser, ils reçoivent donc des OQTF (obligation de quitter le territoire français). Ce sont des personnes qui sont arrêtées dans la rue suite à un contrôle d’identité. Ce sont des sortants de prison, beaucoup de jeunes incarcérés pour des peines mineures, peu pour des peines plus graves, tous interpellés dès leur sortie, sans en avoir été prévenus et emmenés directement au centre pour un nouvel enfermement dont ils ne comprennent pas la cause, car ils ont purgé leurs peines. Cela s’appelle une double peine. Tous sont menottés même ceux qui ne sont jamais allés en prison.
Nous pouvons lire ou entendre dans les médias que les policiers présents (PAF : police aux frontières) ne sont pas assez nombreux. C’est ce qu’avancent aussi les responsables du centre, il faut 7 policiers pour surveiller la grande cour extérieure par crainte d’évasion ! De ce fait, les retenus ont très peu accès à cette cour. Cela est une des atteintes à leurs droits les plus fondamentaux : avoir un accès à l’extérieur pour respirer, voir le grand jour et se défaire par le sport des tensions accumulées. Leurs smartphones leur sont retirés à l’entrée. Les droits de visite sont courts. Beaucoup ont de la famille en situation régulière en France, père, mère, femme, enfants. Certaines familles viennent de loin ou ne peuvent pas venir faute de moyen de transport. Aucun transport local n’est organisé pour permettre aux familles d’accéder au centre et aux retenus libérés d’en repartir. Depuis la gare de Oissel il faut marcher 4 kms sur le bas-côté de la route, dans la forêt, des mamans avec des poussettes, des femmes retenues libérées le soir à la nuit : c’est dangereux ⚠️
Contrairement à la prison où un prisonnier sait à quelle date il sortira, les retenus ne savent pas quand ils seront expulsés. Ils espèrent tous être libérés et ils le seront d’office au bout de 90 jours si la préfecture n’a pas pu les expulser avant. Cette incertitude et les conditions de vie amènent à un tel désespoir que certains retenus passent à l’acte : violence entre retenus, automutilations, tentatives de suicide. Un jeune homme de 30 ans s’est suicidé fin 2021.
Mais les concitoyens savent-ils tout cela ? Dans ce lieu, nous sommes témoins de ce qui se passe, cependant nos témoignages ont du mal à se frayer un passage vers leurs oreilles. Le message qui passe dans les médias est que les échappés sont dangereux ! Nous soutenons qu’ils ont fui pour échapper à la détresse humaine, à l’injustice et aux abus de pouvoir de l’état.
Nous, membres du réseau des visiteurs et observatoire du CRA de Oissel appelons à la fermeture du centre de rétention de Oissel et de tous les CRA de France.
À Rouen, le 11 avril 2023
Réseau de visiteurs et observatoire citoyen du centre de rétention pour étrangers de Oissel – Ligue des Droits de l’Homme de Rouen – Maison des associations et de la solidarité – 22b rue Dumont d’Urville – 76000 Rouen – Tél. : 07 83 76 53 45
Auteur: Région Normandie
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