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À la frontière gréco-turque, les vies de plusieurs milliers de personnes exilées – réduites à une menace et à une monnaie d’échange entre l’UE et la Turquie – sont prises dans un cycle de violences.
Depuis le 1er mars 2020, le gouvernement grec a pris la décision de suspendre le droit d’asile afin de refouler – contre le droit international et européen – toutes les personnes qui tenteraient de pénétrer le territoire européen depuis la Turquie voisine. Pour en savoir plus, voir notre actualité publiée le 3 mars 2020 : De l’approche hotspot au scandale de la guerre aux migrant.e.s.
Les décisions européennes prises à l’issue du Conseil européen extraordinaire du 4 mars 2020 sont essentiellement orientées vers un traitement autoritaire et répressif des personnes migrantes désireuses de rejoindre le territoire européen. Elles échouent à apporter des solutions à la hauteur de la situation humanitaire que subissent les milliers de femmes, d’hommes et d’enfants pris au piège. Parmi les mesures annoncées :
Ces deux dernières demandes, bien qu’orientées vers l’accueil et la prise en charge humanitaire des personnes, sont dérisoires face à la hauteur des besoins et aux moyens répressifs inédits alloués par ailleurs pour empêcher les personnes d’atteindre le territoire européen et expulser rapidement celles qui y seraient déjà parvenues.
En parallèle, la rencontre organisée mardi 10 mars entre le Président turc et les présidents de la Commission européenne et du Conseil européen n’a donné lieu à aucun engagement ni piste de solutions pour sortir de la crise politique et humanitaire.
Pendant ce temps, l’escalade de la violence se poursuit à la frontière atteignant un niveau d’horreur et de violations des droits fondamentaux sans précédent. Les personnes exilées prises en étau dans la région de l’Evros en sont les premières victimes. La disparition de deux jeunes hommes syrien et pakistanais, tous deux décédés des suites de leurs blessures après avoir essuyé des tirs de balles à la frontière, en est l’illustration. La décision de l’équipage danois mis à disposition de Frontex de ne pas suivre les ordres du centre de commandement opérationnel leur demandant de refouler hors des eaux territoriales grecques les passagers d’une embarcation interceptée au large des côtes, témoigne d’une situation où les principes et les valeurs qui guident le droit international et européen semblent voler en éclat.
D’un autre côté, les autorités allemandes ont annoncé qu’un certain nombre d’États européens serait « volontaires » pour accueillir jusqu’à 1500 enfants actuellement bloqués sur les îles grecques. La volonté de mettre en place une procédure spécifique pour protéger et prendre en charge les mineurs non accompagnés a été réaffirmée par la Présidente de la Commission européenne qui se rendra en Grèce demain afin de discuter des modalités opérationnelles de ce plan. Celui-ci devrait se traduire par la relocalisation d’une partie des 5 500 mineure∙s non accompagné∙e∙s sur les îles grecques vers les États membres volontaires, conjugués à des mesures spécifiques pour la prise en charge des celles et ceux qui resteront sur place.
La situation des enfants, et notamment des mineur∙e∙s non accompagné∙e∙s, est extrêmement grave. Les enfants vivent dans des conditions humaines et sanitaires indignes dans les hotspots grecs et sont exposés à de nombreux risques de violence et d’exploitation. Cette situation ne doit toutefois par servir de prétexte à la mise en place d’un filtrage supplémentaire dans le tri des personnes entre celles qui seraient considérées comme « suffisamment vulnérables » pour être protégées de ce cycle de violences et être autorisées à accéder à la demande de protection internationale et les milliers d’autres personnes vivant le même calvaire. D’ailleurs, comment choisir parmi les 5 500 mineur∙e∙s non accompagné∙e∙s recensés sur les îles grecques, les filles et les garçons qui seront relocalisés dans d’autres États européens sinon par la mise en œuvre d’une concurrence entre des situations qui seraient jugées plus ou moins vulnérables ? En priorisant les plus malades ? Celles et ceux de moins de 14 ans ? Comment accepter, pour accueillir et protéger les personnes exilées de hiérarchiser la détresse en fonction de la vulnérabilité évaluée, de la nationalité ou de l’âge ?
Nous le répétons, La Cimade appelle les États européens à un changement de cap urgent et à l’abandon des logiques de tri, d’enfermement et d’expulsion. L’Europe doit permettre un accès inconditionnel au territoire européen pour les personnes bloquées à ses frontières extérieures afin d’examiner avec attention et impartialité leurs situations et d’assurer le respect effectif des droits de tou∙te∙s.
Nous demandons aux États membres de l’Union européenne de tout mettre en œuvre pour faire cesser les violences à la frontière.
Des solutions à la hauteur d’une Europe fondée sur la protection des droits humains, la dignité humaine, la solidarité et l’inclusion, sans discrimination aucune, existent. La directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l’octroi d’une protection temporaire en cas d’afflux massif de personnes déplacées qui ne peuvent rentrer dans leur pays d’origine est prévue spécifiquement pour les cas exceptionnels comme ce qui se passe aujourd’hui à la frontière gréco-turque. Ce mécanisme peut être enclenché sur demande de tout État membre. Nous avons porté cette demande, avec un grand nombre d’organisations syndicales et associatives françaises, auprès du Président de la République.
Propositions et mobilisations collectives :
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Photographie : Arrivée d’un bateau dans le village de Thermis à Lesbos en Grèce le 1er mars 2020. © Elisa Perrigueur [site | twitter]
Auteur: Service communication
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