Monsieur le Président,
Nous, organisations humanitaires, de développement et de défense des droits humains opérant en Israël et dans le Territoire palestinien occupé, lançons un appel clair à la communauté internationale : un cessez-le-feu immédiat et durable. C’est la seule option pour sauver des vies, garantir l’acheminement de l’aide et le respect du droit international humanitaire. Gaza est aujourd’hui un cimetière à ciel ouvert, et la France, en tant que signataire des conventions de Genève, a la responsabilité juridique d’obliger les parties au conflit à protéger les populations civiles.
À Gaza, survivre est devenu impossible. Le système de santé s’est effondré : dans les centres de santé et les hôpitaux surpeuplés, le personnel médical épuisé enjambe des patients allongés à même le sol et pratique des interventions chirurgicales sans anesthésie. Les soignants et les personnes qu’ils accueillent sont menacés par des attaques directes. Plus de la moitié des hôpitaux ne sont plus fonctionnels ; ceux encore capables d’opérer partiellement font face à des pénuries sévères de fuel, de médicaments et d’équipements
médicaux.
Manger une fois par jour et boire de l’eau saumâtre est devenu le quotidien de la population : 1,9 million de civils sont déplacés et contraints de fuir les bombardements, parfois plusieurs fois. Les personnes déplacées dorment dans des voitures, dans les rues ou dans des abris surpeuplés. Bientôt, les épidémies et la famine feront plus de victimes que les bombardements.
Les personnes les plus vulnérables – les enfants, les femmes enceintes et allaitantes, les personnes handicapées, âgées, et atteintes de maladies chroniques – voient leurs chances de survie diminuer rapidement face à l’impossibilité de fuir les hostilités et au manque de ressources essentielles.
Une catastrophe sans précédent
Nous avions prévenu que le siège total imposé par le gouvernement israélien depuis le 9 octobre s’ajoutant au blocus qui dure depuis seize ans ainsi que les restrictions à l’entrée de l’aide humanitaire auraient des conséquences mortelles. Mais l’impact physique et psychologique sur les enfants et les personnes les plus vulnérables est pire que ce que nous pouvions imaginer : il est sans précédent. Une catastrophe entièrement provoquée par l’homme se déroule sous les yeux du monde entier. Les conséquences de cette catastrophe sont dévastatrices et seront durables, il faut l’arrêter maintenant.
Le droit international humanitaire prévoit une chose simple : même les guerres ont des règles. Les opérations militaires en font fi puisque les civils continuent d’être ciblés, y compris dans des zones initialement désignées comme soi-disant « sûres ». Combien de civils devront encore mourir pour que la communauté internationale agisse et qu’un cessez-le-feu soit instauré ?
Nous n’acceptons pas que ces morts et ces destructions massives de quartiers résidentiels, de camps de réfugiés, d’hôpitaux, d’écoles et de lieux de culte soient considérés comme de simples dommages collatéraux. Certains actes pourraient constituer de graves crimes internationaux que les États ont la responsabilité juridique et morale d’empêcher et d’arrêter.2,2 millions de civils ont besoin d’un cessez-le-feu immédiat et durable pour survivre. La guerre a forcé 1,9 million de personnes à se déplacer, de multiples fois, du nord vers le sud, mais également plus loin encore vers la côte, sans jamais leur laisser de répit. Les opérations militaires israéliennes causent un déplacement massif de population. Des milliers de personnes s’entassent désormais dans des zones insalubres, sans aucune garantie de sécurité.
Nous maintenons qu’aucun endroit n’est sûr à Gaza : les soi-disant « zones de sécurité » sont continuellement attaquées et ne permettent pas d’abriter l’ensemble des personnes déplacées. La pause de sept jours, décrétée fin novembre, a été un répit pour la population. Mais elle n’a pas été suffisante pour nous permettre de répondre aux besoins colossaux des civils. La pause a également souligné la nécessité d’arrêter les hostilités pour permettre la libération des otages, qui doit être immédiate et inconditionnelle.
Nous ne pouvons pas acheminer d’aide sous les bombes. Depuis les attaques meurtrières du 7 octobre et le début de l’offensive israélienne, un déluge impressionnant de bombes s’est abattu sur la bande de Gaza, l’une des zones les plus densément peuplées au monde, avec des conséquences catastrophiques pour les plus vulnérables et les plus fragiles, dont les enfants.
Il est illusoire de penser qu’une réponse humanitaire quelle qu’elle soit puisse être apportée lorsque les bombardements sont incessants, que les distributions ne peuvent avoir lieu, qu’une quantité minime d’aide n’est autorisée à entrer que par un unique point de passage, et que le personnel humanitaire n’a pas accès aux populations dans le besoin. De plus, le siège israélien total empêche l’approvisionnement de base en eau, en nourriture, en carburant et en électricité.
Nous demandons que tous les points de passage, y compris Kerem-Shalom et Erez, soient ouverts à l’entrée de l’aide humanitaire et des biens commerciaux.
Pour une cessation totale des hostilités
Sans une intervention réelle, forte et décisive pour contraindre les parties au conflit à une cessation totale des hostilités, la situation humanitaire dans la bande de Gaza continuera à s’aggraver de façon dramatique. Appeler à des étapes intermédiaires vers un cessez-le-feu reporté à l’avenir n’est pas acceptable. Les civils de Gaza n’ont pas le luxe de ce temps. La France doit tirer les leçons de la pause de sept jours qui a eu lieu fin novembre : cette trêve n’a en aucun cas été suffisante pour apporter une réponse humanitaire à la hauteur des besoins des civils de Gaza.
Monsieur le Président, agissez maintenant pour un cessez-le-feu immédiat et durable à Gaza. En cohérence avec la conférence internationale humanitaire pour la population civile de Gaza organisée le 9 novembre à Paris, nous vous appelons à assumer votre responsabilité de faire respecter le droit international humanitaire et protéger les vies civiles en exerçant toute la pression diplomatique de la France sur les parties au conflit, la communauté internationale ainsi que sur les Etats ayant le pouvoir d’imposer un cessez-le-feu. Pour respecter et faire respecter le droit international humanitaire, il faut un cessez-le-feu. Pour apporter de l’aide humanitaire, il faut un cessez-le-feu. Pour sauver des vies, il faut un cessez-le-feu.
Signataires :
- Acat-France Yves Rolland, président
- Action contre la faim Olivier Longué, directeur général
- Amnesty International France Jean-Claude Samouiller, président
- CCFD-Terre Solidaire Sylvie Bukhari-de-Pontual, présidente
- Coordination Sud Olivier Bruyeron, président
- Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) Eléonore Morel, directrice générale
- Handicap International Manuel Patrouillard, directeur général
- Médecins du monde Joël Weiler, directeur général
- Oxfam France Cécile Duflot, directrice générale
- PalMed France Dr Nizar Badran, vice- président
- Plateforme des ONG françaises pour la Palestine François Leroux, président
- Première urgence internationale Thierry Mauricet, directeur général
- Save the children Willy Bergogné, directeur de Save the children
- Europe Secours islamique France Rachid Lahlou, président fondateur
- UOSSM International Raphaël Pitti, conseiller humanitaire et Anas Chaker, secrétaire général
Auteur: Service communication