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À quand le changement de cap de la politique migratoire de l’Union européenne ?

4 juillet 2014

Les 26 et 27 juin derniers, les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE se sont réunis au sein du Conseil européen afin de nommer le nouveau président de la Commission européenne mais aussi pour adopter de nouvelles orientations politiques en matière d’asile et de migrations pour les prochaines années. Décevante, cette « nouvelle » feuille de route s’inscrit dans la continuité des politiques menées jusqu’à présent et ne répond pas de façon adaptée aux enjeux actuels.

Les 26 et 27 juin derniers, les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE se sont réunis au sein du Conseil européen afin de nommer le nouveau président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, mais aussi pour adopter de nouvelles orientations politiques en matière d’asile et de migrations pour les prochaines années. Décevante, cette « nouvelle » feuille de route s’inscrit dans la continuité des politiques menées jusqu’à présent et ne répond pas de façon adaptée aux enjeux actuels.

Après les naufrages en Méditerranée de l’automne 2013, les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE ont annoncé des mesures de court terme censées contribuer à éviter les drames, et ont remis au mois de juin l’adoption d’orientations de long terme dans le domaine de l’asile et des migrations. Le programme de Stockholm, adopté en 2009, feuille de route pour la politique de justice et d’affaires intérieures de l’UE comprenant les questions d’asile et de migrations, prend fin cette année. Les 26 et 27 juin, les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE ont donc adopté de nouvelles orientations sur lesquelles les institutions de l’UE doivent se baser pour l’adoption et la mise en œuvre de la législation dans le domaine de la justice et des affaires intérieures pour les cinq prochaines années. Elles devraient être déclinées de façon plus concrète dans un document d’ici la fin 2014.

Les orientations formulées par le Conseil européen en matière d’asile et de migrations n’apportent rien de nouveau, ne contiennent aucune analyse des enjeux migratoires actuels et ne tirent aucune leçon des politiques menées jusqu’à présent. Pourtant, l’approche sécuritaire et de verrouillage des frontières de l’UE poursuivie ces vingt dernières années mériterait d’être remise en question. Elle est en partie responsable des naufrages en Méditerranée et des morts aux frontières, tant l’accès au territoire européen est devenu difficile, notamment en raison d’une politique des visas de plus en plus restrictive.

Le respect et la protection des droits fondamentaux figurent parmi les grands objectifs des orientations mais semblent rester de l’ordre de l’incantatoire. S’agit-il des droits fondamentaux des citoyens de l’UE ou s’agit-il également de ceux des personnes migrantes, même celles en situation dite irrégulière ? Par quels mécanismes ces droits fondamentaux seront-ils garantis et respectés ?

L’approche n’a pas changé. Si l’importance des droits fondamentaux et de la mise en œuvre effective des droits prévus par la politique d’asile est soulignée, il ressort principalement de ces orientations une vision utilitariste et sécuritaire des migrations. Cet extrait résume bien les quatre volets autour desquelles s’articulent ces orientations : « il est nécessaire de mettre en œuvre une approche globale, qui utilise au mieux les avantages de la migration légale et offre une protection à ceux qui en ont besoin, tout en luttant résolument contre la migration irrégulière et en gérant les frontières extérieures de l’UE avec efficacité ».

La migration est vue comme un outil pour répondre aux besoins démographiques et économiques de l’UE. Les mesures pour encourager la « migration légale » sont envisagées uniquement à travers une démarche d’immigration choisie (« Si elle veut continuer à attirer les talents et les compétences, l’Europe doit élaborer des stratégies visant à tirer le meilleur parti des possibilités qu’offre la migration légale grâce à des règles cohérentes et efficaces, en s’appuyant sur un dialogue mené avec le monde des entreprises et les partenaires sociaux »). En matière d’intégration, les mesures sont très timorées et toujours liées à cet objectif économique (« L’Union devrait aussi soutenir les efforts déployés par les Etats membres pour mener des politique d’intégration active qui encouragent la cohésion sociale et le dynamisme économique »).

Les volets les plus détaillés de ces orientations sont celui de la lutte contre l’immigration irrégulière et du renforcement du contrôle des frontières extérieures. Le Conseil européen incite l’UE à s’attaquer aux « causes profondes de la migration irrégulière », notamment pour éviter les drames aux frontières de l’UE. Pour cela, il est proposé de renforcer la coopération avec les pays d’origine et de transit, « y compris en les aidant à renforcer leurs capacités en matière de migration et gestion des frontières ». On devine bien là les desseins de l’UE : poursuivre sa stratégie d’externalisation pour faire en sorte que les contrôles aient lieu en amont du territoire européen et éviter que les personnes migrantes rejoignent le continent. Continuer de faire des pays d’origine et de transit les gardes-frontières de l’UE, en achetant leur coopération avec de l’aide au développement, des avantages économiques, des accords de facilitation des procédures de visas, etc. Le Conseil européen ne se cache pas de cette méthode de chantage puisque les orientations font référence au principe du « donner plus pour recevoir plus ».
Les orientations soulignent aussi la nécessité de la mise en œuvre effective des dispositions prévues dans les accords de réadmission pour favoriser l’expulsion des personnes.

Quant aux contrôles des frontières extérieures, le Conseil européen appelle au développement de la nouvelle technologie pour assurer une « gestion intelligente », à travers la mise en œuvre de deux nouveaux programmes reposant sur des bases de données biométriques, un programme d’enregistrement des voyageurs et un programme d’enregistrement des entrées et des sorties.
Le Conseil européen demande également le renforcement de l’agence Frontex, en particulier pour « soutenir les Etats membres confrontés à des fortes pressions aux frontières extérieures ». A plus long terme, il est envisagé de mettre en place un système européen de gardes-frontières, proposition particulièrement poussée par la France au sein du Conseil européen. Il n’y a pas de remise en question des actions de Frontex quant au respect des droits fondamentaux, aucune volonté de mettre en place des mécanismes pour améliorer sa transparence, pour encadrer ses opérations, pour permettre aux personnes migrantes de porter plainte, etc.…Il n’y a pas une ligne sur la question du sauvetage en mer.

La politique des visas n’est pas non plus réinterrogée. Le Conseil européen propose seulement de la « moderniser en facilitant les déplacements légitimes »…

Concernant l’asile, les orientations mettent l’accent sur la solidarité et la responsabilité, mais sans proposer de mesures ni de mécanismes concrets. Selon le Conseil européen, la priorité est de mettre en œuvre les textes qui constituent le régime européen d’asile commun mais ces derniers sont loin de permettre la solidarité entre les Etats membres ! Pour cela il faudrait au moins abroger le règlement Dublin III ou le revoir en profondeur.

La solidarité et la responsabilité restent un des grands points faibles. Les Etats membres, faisant chacun face à des réalités migratoires différentes, n’arrivent pas à se mettre d’accord sur une politique commune et ces orientations ne proposent rien de concret pour pallier cette faiblesse.

 

rn

Auteur: Service communication

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