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À quelques mois des élections, le gouvernement hongrois de Viktor Orbán veut faire adopter une loi baptisée « Stop Soros » visant à asphyxier encore un peu plus les organisations de défense des droits humains qui viennent en aide aux personnes migrantes. La Hongrie a complètement fermé sa frontière avec son voisin serbe. Quelques centaines de personnes en demande d’asile sont détenues sur son territoire.
Les organisations critiques dans le viseur du gouvernement
En mission d’observation en Hongrie et Serbie pour documenter la situation des personnes en migration dans ces deux pays, des membres de La Cimade se sont entretenus avec diverses organisations et institutions et ont pu suivre les discussions en cours autour du nouveau paquet législatif « Stop Soros ». Georges Soros, milliardaire américano-hongrois, à l’origine de la fondation Open Society, est la nouvelle cible de campagnes haineuses du gouvernement nationaliste de Viktor Orbán laissant sous-entendre que ce-dernier aurait un plan secret pour installer des millions de personnes d’Afrique et du Moyen-Orient en Hongrie.
Tandis que les organisations de défense des droits humains ont déjà été largement fragilisées en 2017 par une série de mesures (loi sur les fonds étrangers, entraves à l’accès des associations dans les lieux de détention, notamment du Hungarian Helsinki Committee, arrêt de la distribution des fonds européens pour les activités d’intégration des personnes réfugiées etc.), le gouvernement passe à la vitesse supérieure. Il propose de taxer fortement les ONG qui « aideraient l’immigration illégale » et leurs activités et d’interdire aux personnes considérées comme aidant la « migration illégale » d’approcher à moins de 8 kilomètres d’une frontière (frontières internes et externes de l’espace Schengen et points d’entrées sur le territoire, etc.). Cette dernière mesure s’appliquerait aux ressortissant.e.s hongrois.e.s et européen.ne.s, tandis que les ressortissant.e.s de pays tiers feraient l’objet d’une mesure d’éloignement et d’une interdiction de territoire.
Si la loi n’est pas encore adoptée, des amendements ont déjà été ajoutés pour qualifier « l’aide à la migration illégale », qui regroupe pour l’instant un spectre d’activités très large, telles que la mise en place de missions d’observation aux frontières, la préparation et diffusion de documents d’information et de sensibilisation pour les personnes exilées, les dons d’argent et autres actions de solidarité. Par ailleurs, les amendes infligées aux ONG concernées pourraient mettre en péril leurs activités et leur existence. Les acteurs rencontrés ont fait part de leur vive inquiétude quant au climat d’intimidation ambiant et aux campagnes anti-migrants.
La question migratoire pour alimenter les peurs en période d’élection
Le caractère massif de la campagne «Stop Soros », caractérisé par l’omniprésence des affiches, spots télévisés et annonces radio annonçant le « danger migratoire », contraste vivement avec le nombre infime de personnes étrangères ayant pu déposer une demande d’asile en Hongrie : 3 397 en 2017. Depuis la construction d’un double mur à la frontière entre la Hongrie et la Serbie à partir de septembre 2015 et la mise en place de deux zones de transit qui n’acceptent chacune qu’une seule personne par jour ouvré, il est pratiquement devenu impossible d’accéder au territoire hongrois – et donc de l’UE – pour y déposer une demande d’asile. Toutes les personnes en demande d’asile sont automatiquement détenues dans les zones de transit, et y restent pendant de nombreux mois, totalement démunies. Par ailleurs, les cas d’interpellations violentes et de refoulements à chaud dits aussi push-back vers la Serbie et la Roumanie sont devenus la norme. De nombreuses organisations ne cessent de documenter ces violations des droits quotidiennes et d’alerter les instances de l’Union européenne, sans que la situation ne s’améliore.
La question migratoire est devenue aux yeux du gouvernement hongrois le prétexte parfait pour monopoliser l’attention de l’opinion publique et attiser les peurs d’une invasion, en évitant habilement la discussion des véritables questions sociétales. Dans ce contexte, la société civile hongroise défendant les droits et libertés fondamentales a plus que jamais besoin du soutien de la communauté européenne et internationale.
Pourtant, l’UE tarde à se faire entendre et même si plusieurs procédures d’infraction sont en cours, Viktor Orbán continue à être reçu à bras ouverts dans différents pays européens. Ainsi, tout se passe comme si les gouvernements européens et la Commission européenne préféraient fermer les yeux sur les dérives actuelles de la Hongrie, et ne pas remettre en cause son rôle de « chien de garde de l’Europe ».
Auteur: Pôle Europe et International
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