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L’annonce d’un possible transfert de compétences des conseils départementaux à l’État inquiète les associations. Violaine Husson, en charge du dossier à La Cimade, explique pourquoi.
La ministre de la justice et sa collègue des solidarités et de la santé ont précisé, le 18 septembre 2017, qu’un abondement budgétaire de 6,1 millions d’euros serait versé par l’État au titre du remboursement des frais engagés en 2017 par les conseils départementaux pour la prise en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE) des mineurs non accompagnés. Elles ont également évoqué une participation à hauteur de 30% des frais engagés en 2017. Ces engagements ne correspondent-ils pas soit à des dettes remboursées, soit à des promesses faites à l’époque par l’ancien ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve ?
Je ne peux pas dire si cette annonce fait suite aux promesses du ministre. Mais ce qui est sûr, c’est que certains départements indiquent qu’ils ne sont pas à même financièrement d’assurer la protection des mineurs isolés étrangers. Ils exercent d’ailleurs une pression assez importante sur le gouvernement en partant du postulat que cet accompagnement et cette prise en charge relèvent d’une compétence régalienne.
Dans son discours à l’Assemblée des départements de France le 20 octobre 2017, Le Premier ministre a annoncé que l’État allait provisionner 132 milliions d’euros dans le budget 2018 pour les surcoûts engendrés par cette prise en charge par les départements d’un nombre croissant de mineurs non accompagnés. Cette annonce est-elle en mesure de répondre aux surcharges actuelles de l’aide sociale à l’enfance ?
La possibilité ouverte par le gouvernement « d’assumer » cette prise en charge des mineurs représente une avancée certaine pour les finances des conseils départementaux.
Remettons cependant des chiffres dans ce contexte : les mineurs isolés étrangers ne représentent qu’une faible part de l’ensemble des mineurs et jeunes majeurs accueillis à l’ASE : 25 000 enfants, soit un peu moins de 8 % des enfants prise en charge (331 900 en 2016). La France par ailleurs accueille peu de mineurs étrangers isolés en comparaison d’autres pays de l’Union européenne. Que certains départements rencontrent des difficultés pour faire face à l’augmentation actuelle – toute relative cependant – du nombre de jeunes isolés à protéger est un fait. Que la solution soit de les délester de ce qui relève de leur compétence sur la base de la nationalité de ces enfants est discriminatoire.
L’Assemblée des départements de France estime le coût total de la phase de mise à l’abri à environ un milliard d’euros pour 2016, depuis leur arrivée sur le territoire jusqu’à leur majorité. Rapporté aux dépenses brutes totales des départements pour l’ASE (7,725 milliards en 2015 selon le ministère, sur un total de 38,525 milliards d’euros de dépenses sociales brutes), ce milliard représenterait 13 % des dépenses de l’ASE.
Par ailleurs, selon un récent rapport de la Cour des comptes sur les finances publiques locales,
si l’ensemble des dépenses sociales des départements ont augmenté de 25 % entre 2010 et 2016 (+ 44 % pour le RSA/RMI), les dépenses d’aide sociale à l’enfance ont, elles, très peu augmenté (+ 5 % en euros constants entre 2011 et 2015 selon le ministère).
Le chef du gouvernement a également annoncé que « l’État assumera à la place des départements l’évaluation et l’hébergement d’urgence des personnes se déclarant mineures et ce jusqu’à ce que leur minorité soit confirmée ». Cette annonce vise-t-elle à garantir financièrement l’aide de l’État, au-delà du délai initial de prise en charge de cinq jours ? S’agit-il d’un concours financier ou d’un transfert de compétences qui maintiendrait la protection des mineurs non accompagnés dans un droit spécifique ?
Les annonces ne sont pas encore très claires : le système actuel ne fonctionne pas. Pour l’instant, le gouvernement réfléchit à une prise en charge de la mise à l’abri et de l’évaluation.
Mais si les évaluations doivent se faire après cinq jours (plus huit si besoin), la plus grosse partie financière revient toujours aux conseils départementaux (la prise en charge peut durer plusieurs mois, voire plusieurs années).
Dans tous les cas, ce constat des dysfonctionnements du dispositif mis en place ne saurait appeler un glissement vers un cadre juridique spécial, hors du droit commun de la protection de l’enfance. Dans la pratique, ces enfants, parce qu’étrangers, sont souvent écartés pendant cette phase du dispositif de la protection de l’enfance pour basculer dans le régime du droit des étrangers. La création d’un dispositif dérogatoire au droit commun pour les personnes étrangères n’est jamais une bonne nouvelle, a fortiori lorsqu’il vise des enfants.
Que peut-on attendre du plan d’action annoncé par le gouvernement le 10 juillet 2017 et prévu pour début 2018 ?
Une nouvelle atteinte aux droits des personnes étrangères… Il me semble qu’un transfert de la mission d’évaluation et d’hébergement vers l’État reviendrait à faire un tri entre protection de l’enfance et mineurs étrangers. Cette annonce du gouvernement impliquerait de scinder le suivi des mineurs : d’un côté la protection de l’enfance, confiée aux départements ; de l’autre, l’extranéité des mineurs relevant de l’État. La création d’un dispositif de prise en charge spécifique, discriminatoire, serait contraire aux engagements internationaux de la France.
Propos recueillis par Dominique Chivot
Pour aller plus loin :
Photographie : Pause pour une classe de FLE au foyer pour mineurs isolés étrangers de Saverdun, 2016. © Célia Bonnin
Auteur: Service communication
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