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Interview de Marie Hénocq, responsable de la commission migrants, à propos du débat parlementaire autour des taxes exigées aux personnes étrangères lors de la demande d’un titre de séjour.
Entretien avec Marie Hénocq, responsable de la commission migrants à La Cimade
Ces taxes ne sont ni justes, ni raisonnables. Elles ont excessivement augmenté ces dernières années en particulier dans la loi des finances pour 2012. Aujourd’hui un premier titre de séjour peut coûter jusqu’à 708€, par personne j’entends, donc imaginez pour une famille ! Et on demande ces sommes à des gens qui arrivent, qui n’ont pas encore de titre de séjour, donc qui n’ont pas le droit de travailler en France.
Le comble, c’est que depuis le 1er janvier 2012, une partie de ces taxes, d’un montant de 110 € doit être acquittée au moment même du dépôt de la demande de titre de séjour. Et si la demande est refusée, bien sûr la personne n’est pas remboursée. Il ne s’agit donc pas d’une taxe pour couvrir les frais liés à la fabrication d’un titre de séjour, mais bien de la mise en place d’un service public payant pour les personnes étrangères.
Ces taxes alimentent le budget de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII). Or ce n’est pas aux personnes qui viennent d’arriver en France de financer une institution censée mener un politique d’intégration pour les personnes en situation régulière ! Surtout que si nous appelons de nos vœux la mise en place d’une véritable politique d’intégration, pour l’instant celle-ci est discutable. N’oubliez pas que le budget de l’OFII sert, entre autres, à financer la politique de retour volontaire qui concerne principalement des citoyens européens, politique qui fait gonfler le nombre d’expulsions du territoire…
D’abord, les personnes viennent nous dire « il y a un problème, la préfecture a dû se tromper, elle m’a demandé 110€ pour déposer ma demande ». Ensuite, quand nous leur expliquons que c’est désormais inscrit dans la loi, la plupart se débrouillent de toutes les manières possibles pour trouver l’argent, soit grâce à la solidarité, soit en s’endettant dans des conditions qu’on ne peut pas imaginer. Elles n’ont pas d’autre choix. En ultime recours, ce sont les associations caritatives ou les services sociaux qui paient : est-ce bien leur rôle ?
D’abord, nous avons saisi les parlementaires pour revenir sur ces taxes lors du projet de loi de finances rectificative en juillet. Seuls les sénateurs ont soulevé la question et le gouvernement leur a répondu qu’il était prématuré d’y revenir mais que la question serait réglée en fin d’année. Or dans le projet de loi de finances pour 2013, le gouvernement propose une rectification qui nous semble insuffisante : le maximum de la taxe de première délivrance d’un titre de séjour est diminué de 100€ et la taxe d’embauche des ressortissants européens, visant principalement les Roumains et les Bulgares, est supprimée. Mais les taxes de renouvellement ainsi que les taxes de régularisation des travailleurs augmentent. Lors du passage à l’Assemblée nationale, quelques députés ont obtenu l’accord du gouvernement pour déposer un amendement diminuant la part de la taxe à acquitter lors du dépôt de la demande. Attention, le montant global de la taxe est maintenu (les 60€ qui ne sont plus payés à la demande le sont, le cas échéant, au moment de la délivrance du titre de séjour).
Lors du débat au Sénat, le groupe communiste a présenté un amendement répondant à l’ensemble de nos préoccupations ; plusieurs sénateurs socialistes ont cosigné notamment un amendement qui demandait la suppression du principe de paiement lors de la demande. Or en séance, le gouvernement leur a demandé de le retirer en arguant que cela coûterait trop cher. Seul le groupe communiste a repris cet amendement et lors du scrutin public, sur 343 votants, 33 sénateurs ont voté pour son adoption ! Tous les sénateurs socialistes ont voté contre.
Aujourd’hui, comme le projet de loi a été rejeté par le Sénat, le texte doit encore être relu à l’Assemblée une dernière fois le 13 décembre. Nous continuons donc notre plaidoyer auprès des parlementaires…
Non, ça ne l’était pas. Cependant, les associations ont porté cette revendication lors de chaque rencontre avec les ministères concernés, en rappelant que ce sujet devait être réglé urgemment, avant notamment la publication de la circulaire sur les critères de régularisation. Aujourd’hui, clairement, vu le flou qui entoure cette circulaire entrée en vigueur au début de la semaine, les personnes étrangères ne savent pas si elles pourront voir leur situation administrative régularisée. Mais pour jouer à la loterie, elles devront payer d’avance 110€.
Auteur: Service communication
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