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Hadjira a été assassinée par son conjoint ce 20 juillet, en région parisienne. Face à cet acte insoutenable, c’est d’abord vers ses enfants et sa famille que se tournent toutes nos pensées. La Cimade, qui accompagnait Hadjira depuis plusieurs mois, est profondément marquée par ce féminicide et préoccupée par les nombreuses défaillances du système de protection des femmes victimes de violences qui ont conduit à ce drame.
Hadjira avait confié à ses proches, à plusieurs associations et à la police sa peur face à son conjoint. Ses plaintes pour violences physiques et surtout psychologiques n’ont pas été prises au sérieux. L’auteur des violences n’a jamais été convoqué et ses plaintes n’ont pas eu de suite. Moins de trois mois avant son féminicide, sa demande d’ordonnance de protection avait également été rejetée par la justice.
Pour les institutions censées protéger toutes les personnes, et notamment les femmes victimes de violences conjugales, les violences psychologiques ne se voient pas et par voie de conséquence, ne déclenchent pas de mesure de protection.
« Dans un pays qui prendrait en compte toutes les formes de violences, les personnes victimes de tels faits devraient être immédiatement protégées quand elles appellent à l’aide. Dans notre réalité, c’est très loin d’être le cas » déclare Céline Roche, Chargée de projet autour des questions de genre à La Cimade. Le ministère de l’Intérieur a rendu publiques les terribles nouvelles statistiques du nombre de morts violentes au sein du couple en 2022. Ces données viennent confirmer que la plupart des victimes avaient signalé les faits aux forces de l’ordre ou déposé plainte.
En France depuis 6 ans et mère de 2 enfants, Hadjira était mariée à un homme qui s’est toujours opposé à ce qu’elle obtienne un titre de séjour. Il a commencé à se montrer violent en juillet 2022 et lui avait interdit l’accès du domicile conjugal. Il a gardé un des enfants avec lui et a ainsi empêché Hadjira de le voir.
Hadjira avait saisi le juge aux affaires familiales d’une demande d’ordonnance de protection. Pour étayer les violences dénoncées, et le danger auquel elle était exposée, Hadjira avait apporté plusieurs preuves des violences subies. Mais le Juge a considéré que ces justificatifs s’appuyaient essentiellement sur des dépôts de plainte et le témoignage de la famille. Il a aussi souligné qu’il n’y avait pas eu de nouveaux actes de violences entre la séparation et la demande d’ordonnance de protection. Indiquant que les dépôts de plainte reprenaient seulement les déclarations de la requérante et qu’ils n’avaient fait l’objet d’aucune suite, le juge a alors considéré qu’ « en l’absence de violences et de danger actuel vraisemblables, les mesures de protection sollicitées seront rejetées ». Déniée en tant que victime, meurtrie et inquiète en tant que mère, Hadjira a vu tous ses espoirs s’effondrer. La seule solution pour revoir son fils a été le retour au domicile conjugal avec son mari où il la tuera 5 semaines plus tard. Le système pénal et judiciaire l’a abandonnée. Les conséquences en ont été fatales.
Les violences psychologiques sont pourtant reconnues comme des violences par la loi.
Quelles étaient les violences dénoncées par Hadjira ? Insultes, propos humiliants, harcèlement avec répétition d’accusations imaginaires, crachats, gifles, mise à l’écart de toute vie sociale et administrative en empêchant sa régularisation administrative, séquestration au domicile conjugal, puis au domicile des beaux-parents avec interdiction d’amener l’enfant à l’école, puis expulsion du domicile conjugal sans ressources, chantage et entrave aux relations avec l’aîné des enfants.
De fait, la plupart de ces violences sont considérées soit comme des violences psychologiques ne déclenchant que peu de protection, soit ne sont pas considérées comme des violences car il n’y a pas eu de coups. La réticence des institutions est massive à estimer, y compris en présence de preuves fournies, que les violences dites « psychologiques » puissent être véritablement des violences. La parole de la victime est discréditée. Les auteurs nient avoir été violents, attaquent la crédibilité de la victime et, comme pour Hadjira à l’audience, les accusent de demander une protection dans l’unique but d’obtenir des papiers. Les femmes victimes de violences, lorsqu’elles sont étrangères, subissent une emprise décuplée car leur droit au séjour dépend du maintien du lien conjugal avec l’auteur des violences.
Selon Violaine Husson, Responsable des questions Genre et Protections, à La Cimade, les institutions chargées de la protection des victimes de violences faillissent à leur mission. « Un réel travail de prévention et de prise de conscience s’impose. Il est urgent que la France réagisse, mette en place des mesures de protection efficaces, fasse appliquer les textes, crée des places d’hébergement, forme les différents acteurs et actrices à toutes les formes de violences et adopte les fonds nécessaires pour une véritable politique de lutte contre les violences faites aux femmes ».
Pour La Cimade, c’est en mettant enfin en œuvre les mesures nécessaires que toutes les femmes victimes de violences, y compris les ressortissantes étrangères, seront effectivement protégées sur le territoire français.
Auteur: Service communication
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