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Se faire soigner ou vivre entouré·e de sa famille ? Les enfants ne devraient pas avoir à choisir !

22 mars 2023

Dans l’Océan Indien, La Cimade dénonce les séparations de famille entre Mayotte et La Réunion dans le cadre d’évacuations sanitaires (EVASAN). Elle alerte sur les ruptures de lien entre l’enfant malade soigné·e à La Réunion et le parent resté à Mayotte dans le cas d’hospitalisations longues voire pire, de fin de vie.   […]

Dans l’Océan Indien, La Cimade dénonce les séparations de famille entre Mayotte et La Réunion dans le cadre d’évacuations sanitaires (EVASAN). Elle alerte sur les ruptures de lien entre l’enfant malade soigné·e à La Réunion et le parent resté à Mayotte dans le cas d’hospitalisations longues voire pire, de fin de vie.  

En 2021, plus de 1100 personnes ont été évacuées depuis Mayotte vers La Réunion pour y être soignées. Cette procédure a pour but de pallier les manques de l’offre de soins à Mayotte. Parmi les personnes évacuées, au moins 40% sont de nationalité étrangère.  

La procédure d’EVASAN est énoncée de façon imprécise dans un décret dont la seule valeur légale questionne sur sa faculté à préserver les droits fondamentaux des personnes concernées. En effet, il n’y a aucune indication précise qui permette de garantir, par exemple, le droit des enfants à vivre entouré·e·s de leurs parents et fratrie. La question de l’adulte accompagnant est donc soumise à la libre lecture de la Commission EVASAN. La liberté de circulation et d’installation est également entravée et contraire au droit au séjour puisque l’EVASAN est décrite comme un aller ET un retour Mayotte-La Réunion-Mayotte sans préciser que les personnes peuvent avoir le droit de rester à La Réunion, conduisant à des transferts contraints d’un département français à l’autre. Ainsi, dans les faits, cette procédure s’avère être source de violations des droits des patient·e·s et personnes accompagnantes. 

La petite Fayda* est née en 2021 aux Comores, avec une pathologie sévère ne pouvant être soignée dans son pays d’origine. Ses parents prennent alors la décision difficile d’entreprendre un parcours de soins loin des Comores. La famille se rend d’abord en Tanzanie où l’enfant subi une première opération. De retour dans son pays d’origine, l’état de santé de Fayda nécessite des soins plus approfondis. Il reste encore la possibilité, pour le nourrisson, d’être soignée à Mayotte, mais son père déclare que « la décision de partir à Mayotte n’a pas été facile, car j’avais peur de prendre le kwassa-kwassa avec ma famille ». La traversée qui sépare l’île Anjouan de Mayotte n’est en effet pas sans risque. Les 70 km se parcourent dans de frêles embarcations qui ne sont en rien adaptées au transport de personnes et encore moins d’enfants malades. Les parents de Fayda ont cependant choisi de prendre ce risque pour la survie de leur fille.  

Ils montent dans le petit bateau de pêche à 4h du matin et ne posent le pied sur le territoire français près de 20h plus tard. A Mayotte, la famille se rend au Centre Hospitalier de Mamoudzou, où Fayda reçoit les premiers soins dont elle a besoin en urgence et supporte une deuxième opération. Les capacités de soins de l’hôpital ne permettant pas d’assurer la survie du nourrisson, les médecins décident de demander son évacuation sanitaire vers La Réunion. La pratique de la procédure d’EVASAN ne permet qu’à un seul parent d’accompagner l’enfant malade – même si les textes n’auraient pas empêché la venue du second adulte. La maman de Fayda étant positive à la Covid-19 au moment du départ, et par ailleurs enceinte, c’est son père qui l’accompagne. A La Réunion, l’enfant doit à nouveau endurer plusieurs opérations chirurgicales, mais le diagnostic des médecins reste sans appel : elle devra suivre des soins à La Réunion toute sa vie et ne pourra retourner dans son pays d’origine 

Sa mère, toujours à Mayotte, coincée sur un territoire qu’elle ne connait pas, et à des milliers de kilomètres de sa famille, donne naissance à la petite sœur de Fayda. La mère, accompagnée de son nouveau-né ne parvient pas, pendant près de deux ans, à obtenir de rendez-vous en Préfecture pour effectuer une demande de titre de séjour. Elle ne parvient pas non plus à se voir délivrer un laissez-passer afin de rejoindre le reste de ses proches, alors même que les médecins à La Réunion ont à maintes reprises rappelé la nécessité pour Fayda de vivre entourée de toute sa famille. En effet, de nombreuses attestations et certificats médicaux attestent que la présence des proches représente un soutien psychologique indéniable pour une meilleure adhésion de l’enfant à son parcours de soins. De même, la présence de deux parents permet la stabilisation de la situation familiale : tandis que l’un accompagne l’enfant dans ses soins, l’autre peut rechercher un emploi, et donc sortir de systèmes de dépendances et d’une précarité annihilante.  

La procédure d’EVASAN et l’engagement des personnels hospitaliers ont permis de sauver la vie de Fayda. Cependant, il a fallu attendre plus de deux ans de séparation et les multiples tentatives d’interpellations des autorités locales pour qu’enfin, une saisine du Défenseur des Droits permette l’octroi du fameux laissez-passer. 

La Cimade dénonce la séparation des familles dans le cadre de la procédure d’évacuation sanitaire. Il en va de l’intérêt supérieur de l’enfant que de ne pas être séparé de ses parents. La possibilité pour un enfant d’accéder aux soins dont il a besoin ne devrait pas être synonyme de séparation avec sa famille. En vertu du droit à la vie privée et familiale, La Cimade demande donc le respect des droits fondamentaux de l’enfant et l’octroi d’un laissez-passer systématique pour les parents et frère et sœur d’un enfant malade.   

 

* Les noms et prénoms ont été modifiés 

Auteur: Région Océan Indien

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