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En novembre 2024, quarante ans après l'ouverture des premiers centres de rétention ...
Eurostat a publié des données arrondies sur les demandes d’asile en France et en Europe. Analyse.
Selon les statistiques du ministère de l’intérieur, 121 200 demandes ont été enregistrées par les GUDA (c’est à dire que les préfets ont délivré une attestation de demande d’asile). 46 250 l’ont été en procédure normale, soit 38.2% (38 600 premières demandes adultes, 7550 mineurs et plus surprenant 100 réexamens) ; 33 450 en procédure accélérée, soit 27.6% (20 000 premières demandes adultes, 7 200 mineurs, 4 700 réexamens et 1 550 mineurs en réexamen) et 41 500 Dublinés, soit 34% du total (35 900 adultes, 5 450 mineurs et 150 réexamens).
Statistiques des premières délivrances d’attestation de demandes d’asile en 2017
1eres attestations délivrées | 1ère demandes adultes | mineurs | réexamens | mineurs réexamens | total |
Normale | 38 600 | 7 550 | 50 | 50 | 46 250 |
Accélérée | 20 000 | 7 200 | 4 700 | 1 550 | 33 450 |
Dublin | 35 900 | 5 450 | 100 | 50 | 41 500 |
Total demandes | 94 500 | 20 200 | 4 850 | 1 650 | 121 200 |
Un tiers des demandeurs d’asile en France sont des Dublinés, ce qui est une proportion inédite, mais en-deçà des 52 % , annoncés par une circulaire du ministre de l’intérieur . Il s’agit de la part des personnes déjà connues dans la base de données EURODAC dont certains relevés effectués en France.
Selon les statistiques de l’OFPRA, 7 3 689 premières demandes adultes, 19 141 mineurs accompagnants et 7 582 demandes de réexamens ont été enregistrées à l’OFPRA soit une hausse de 17% par rapport à 2016. La barre symbolique des 100 000 demandes est donc franchie. La première nationalité de demandes est sans conteste l’Albanie suivie de l’Afghanistan, d’Haïti (demandes déposées principalement en outre-mer), le Soudan et la Syrie (dont une grande part sont des réinstallés ou des relocalisés)
Ces données surprennent par l’importance de la différence entre les données du ministère de l’intérieur et celles de l’OFPRA . En tout 22 272 demandes supplémentaires ont été introduites à l’OFPRA pour les seules catégories pouvant y accéder (en procédure normale ou accélérée) dont plus de 15 000 premières demandes adultes et 3 182 réexamens.
Des difficultés pour recueillir l’ensemble des données sont possibles (notamment pour les demandes de réexamen qui relevaient de la compétence de tous les préfets de départements jusqu’en 2016 et qui pour certaines n’ont pas donné lieu à la délivrance d’une attestation). 2 000 demandes correspondraient aux personnes réinstallées arrivant directement du Liban, de Jordanie, de Turquie, du Niger ou du Tchad. Environ 1 000 sont des demandes d’asile introduites dans les centres de rétention (une attestation n’est pas délivrée dans ce cas, sauf si la personne est libérée).
L’explication a été apportée à La Cimade par le service statistique du ministère de l’intérieur : les données publiées portent sur le nombre de première délivrance des attestations.
Mais il faut aussi compter les Dublinés « requalifiés » après l’extinction de la procédure Dublin. Selon le ministère, 4 200 Dublinés de l’année sont entrés dans la procédure normale et 2 900 en procédure accélérée soit 7 100 auxquels il faut ajouter les personnes enregistrées les années précédentes (7 400 en procédure normale et 2 000 en procédure accélérée). 1 293 personnes ont été transférées en 2016 et 2 330 en 2017.
Au total 16 500 personnes anciennement en procédure Dublin ont pu déposer une demande d’asile en 2017 (22% du total). On arrive donc à 50 200 personnes adultes en procédure normale et 24 900 en procédure accélérée (soit 32% des demandes). Si on comptabilise les réexamens, le taux de procédure accélérée est de 39%.
A la fin 2017, 28 800 Dublinés enregistrés en 2017 étaient encore dans cette procédure et on peut estimer à 6 200 les Dublinés de 2016 qui ont soit été transférés, soit admis à la procédure OFPRA, soit encore en procédure, soit 35 300 personnes adultes.
Ce nombre important de demandes de personnes « dublinées » en instance aura des conséquences sur les demandes en 2018. En effet, même si le taux de transfert double pour atteindre 20% , plus de 28 000 personnes dublinées devraient pouvoir accéder à la procédure OFPRA ( parfois après avoir connu un purgatoire de deux années) en plus des « primo-demandes » enregistrées dans l’année.
En 2017, l’OFPRA a pris 89 307 décisions adultes (115 000 en comptant les mineurs) et a reconnu 13 020 personnes réfugiées, octroyé la protection subsidiaire à 10 895 personnes soit 26.9% des décisions. Pus de 65 000 ont été rejetées.
Selon les données arrondies publiées par EUROSTAT (qui ne comprennent pas les personnes relocalisées), l’OFPRA a pris plus de 85 000 décisions adultes dont 11 345 statuts de réfugié et 10 825 PS ( on en déduit que 1675 réfugiés et 160 PS sont des relocalisés). Le taux d’accord des demandeurs adultes (sans les relocalisés) est de 25,8% . Le Soudan est la première nationalité de reconnaissance de statut en nombre (plus de 3 100 décisions) devant L’Irak (1020) et la Syrie (765 sans les relocalisations). Mais le phénomène principal est l’augmentation de la part des protections subsidiaires avec notamment l’Afghanistan (5010), la Syrie (1825 soit les ¾ des accords) ou le Soudan 615. Le Koweït (100% de statut), le Yémen (100% dont 62% de PS), la Syrie (93.5 dont 66% de PS), le Burundi (92.3% de statut) et l’Irak (85% dont 17% de PS) sont les cinq nationalités ayant le plus fort taux d’accord)
La CNDA a enregistré 53 581 recours. Plus de 47 000 décisions ont été prises dont 5 400 annulations reconnaissant le statut et 2 607 protections subsidiaires soit 16.7% des décisions. Au total le nombre inédit de 32 000 protections (43 000 en comptant les mineurs) ont été accordées soit 36% du total.
L’OFPRA avec les moyens supplémentaires alloués a considérablement diminué le nombre de dossiers en instances puisqu’on peut l’estimer à 30 840 avec un délai moyen de trois mois (quatre en délai moyen prévisible). Un peu plus de 25 000 recours sont en instance à la CNDA soit un délai moyen prévisible de près de 6 mois. En revanche, ce n’est pas le cas pour les personnes en attente d’enregistrement dans les GUDA où, malgré des effectifs supplémentaires, le délai moyen en novembre était de 27 jours ouvrés et également pour les Dublinés qui représentent près de 38 000 personnes. Au total on peut estimer que le nombre de demandeurs d’asile en instance en France est de près de 126 000 demandeurs dont 10 000 sont démunis d’attestations (Dublinés considérés en fuite et demandeurs de réexamen présentant une deuxième ou n-iéme réexamen).
Les données d’Eurostat permettent de donner une perspective européenne à ces données. Avec un peu plus de 700 000 demandes en 2017, le nombre de demandes d »asile en Europe a connu une baisse de 43% par rapport à 2016, qui s’explique par la forte baisse en Allemagne (220 000 contre 745 000) qui est une illusion statistique. En effet une bonne part des demandes enregistrées en 2016 par ce pays était le fait de personnes arrivées en 2015.
L’Italie est le deuxième pays d’accueil avec 128 000 demandes et la France troisième avec 121 200 demandes.
Si on regarde les décisions prises par ces trois pays : l’Allemagne a rendu plus de 500 000 décisions en 2017 avec un taux d’accord de 48%. La France est en deuxième position avec 115 000 décisions (mineurs compris) et un taux de 26%. L’Italie est troisième avec près de 75 000 décisions et un taux d’accord de 40%. Cependant l’Italie comme l’Allemagne ont un statut dit humanitaire qui est le principal motif d’octroi en Italie.
Enfin, la France n’est pas la plus mal lotie en matière de dossiers en cours d’instruction en première instance puisque même en comptant les Dublinés, elle en compte nettement moins que l’Allemagne (400 000 soit 9 mois de délai) ou que l’Italie (148 000 soit deux ans de délai).
Auteur: Responsable national Asile
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