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Expulsions : Mayotte reste une zone de non droit

14 février 2020

Dans un rapport publié le 11 février 2020, le Défenseur des droits alerte sur la situation critique de l’accès aux droits dans le 101e département français et fustige les choix politiques focalisés sur la « question migratoire » au détriment des autres problématiques communes à l’ensemble des habitant‧e‧s.

expulsions Mayotte

La Cimade partage les constats du Défenseur des droits et critique depuis des années de manière générale les régimes dérogatoires et en particulier l’obsession des expulsions à Mayotte.

Ainsi, la préfecture de Mayotte se félicite des chiffres pour 2019 qui ont dépassé 27 000 expulsions ; soit l’équivalent de 10 % de la population de ce territoire d’à peine 374 km2. Un peu plus de 18 000 renvois forcés ont eu lieu depuis la métropole en 2019. Pourrait-on imaginer 6 millions d’expulsions ?

Symboles de cette violence institutionnelle :

  • Shikandra – le nom donné à l’opération civilo-militaire pour « lutter contre l’immigration » – un poisson qui attaque quand on l’approche ;
  • Pièges administratifs qui s’étendent désormais jusqu’aux lieux autrefois considérés comme relativement protégés : associations d’aide aux personnes et centre hospitalier de Mamoudzou pour contrôler, arrêter, enfermer et expulser plus.

Or, la mise en œuvre de ces politiques se fait au détriment des droits fondamentaux des personnes : droit de circulation entravé, droits sociaux en deçà des standards métropolitains, absence de couverture santé pour les plus précaires, dérogations au droit de la nationalité, droits au rabais pour les personnes en demande d’asile, droits des enfants bafoués (obligation de scolarité ineffective, enfermement massif dans le centre de rétention de Mamoudzou), expulsions expéditives vers les Comores, etc.

Ces atteintes sont largement décrites dans le rapport du Défenseur des droits. Il considère que les discours publics qui pointent du doigt une « invasion » comorienne permettent à l’État de justifier les dérogations du droit à Mayotte. Entièrement tournés vers le seul objectif de « dissuader autant que possible l’immigration irrégulière des Comores », ces discours omettent par ailleurs de rappeler que c’est la frontière administrative matérialisée par le visa dit « Balladur » en 1995 qui a transformé Mayotte en forteresse contre laquelle se sont brisées des milliers de vies de femmes, d’hommes et d’enfants.

Selon le Défenseur, « au-delà des atteintes aux droits directement imputables à cette politique focalisée sur le problème migratoire à Mayotte, les services du Défenseur des droits ont pu observer comment celle-ci tendait à conforter, dans d’autres domaines, le désengagement des pouvoirs publics et à masquer les carences du service public ».

Derrière l’affichage politique et les postures viriles, La Cimade rappelle qu’il s’agit avant tout d’histoires humaines. Les choix politiques qui sont faits ont des conséquences réelles qui affectent l’ensemble du territoire. Les dizaines de milliers d’expulsions expéditives en 2019 sont d’autant plus critiquables qu’elles concernent des personnes qui – si elles résidaient dans un autre département – pourraient prétendre à un titre de séjour, voire même la nationalité française ; soit parce qu’elles y sont nées ou arrivées très jeunes, soit en raison des attaches familiales intenses et anciennes qu’elles possèdent sur le territoire.

Au lieu de cela, des enfants sont séparé‧e‧s de leurs parents et abandonné‧e‧s à leur sort sur l’île. Face au risque d’interpellation, les familles se terrent, négligeant les soins et prenant des risques potentiels pour leur santé – particulièrement celle des enfants. Ce sont aussi autant de demandes de régularisation qui ne sont pas effectuées par peur des contrôles, alors qu’il s’agit de la seule voie pour obtenir le droit de vivre dignement à Mayotte.

L’alerte lancée par le Défenseur des droits sera-t-elle entendue par les autorités pour Établir Mayotte dans ses droits ?

 

 

Photographie : Scène quotidienne des expulsions à Mayotte via un bateau en partance pour Anjouan © Lény Stora / Docpix

Auteur: Service communication

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