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Avec son décret d’expérimentation sur le traitement des demandes d’asile en Guyane, le gouvernement franchit un pas supplémentaire en ajoutant de nouvelles mesures qui visent à détruire l’accès cette procédure avec pour finalité de les étendre à tout le territoire français.
Le projet de loi Asile et Immigration, adopté en première lecture à l’Assemblée nationale et durci sur certaines de ses dispositions par le Sénat, prévoit de détériorer les droits des personnes étrangères, avec notamment des dérogations spécifiques pour la Guyane qui viennent entraver davantage la possibilité de demander asile dans ce département. [1]
Par un décret du 25 mai 2018 « portant expérimentation de certaines modalités de traitement des demandes d’asile en Guyane », le gouvernement franchi un pas supplémentaire en ajoutant de nouvelles mesures qui visent à détruire l’accès à cette procédure en Guyane avec pour finalité de les étendre à tout le territoire français.
En effet, ce décret pose des modalités intenables pour déposer une demande complète devant l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Une fois identifiées auprès de la préfecture, les personnes disposeront de 7 jours et non plus 21 jours, pour présenter leur demande d’asile à l’OFPRA par écrit et en Français. La demande doit par ailleurs être remise en main propre à l’antenne de l’OFPRA située à Cayenne et non plus transmise par courrier.
Or les personnes en demande d’asile vivent dans des conditions de fragilité faisant souvent de la survie leur première préoccupation et maîtrisent rarement le français à l’écrit. Elles peuvent également être établies loin de Cayenne, et en butte au franchissement des barrages permanents de gendarmerie situés à proximité des frontières fluviales lesquels entravent déjà l’accès aux institutions pour les personnes résidantes hors de l’île de Cayenne [2]. Ces nouvelles conditions ont pour conséquence d’exclure de la procédure d’asile les personnes les plus isolées et les plus fragiles.
Le décret supprime également le « délais de distance » qui permettait aux demandeurs/euses résidant dans les outres mers d’avoir 1 mois supplémentaire pour faire appel d’un refus de l’OFPRA devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), située en région parisienne. Ce délai de distance permettant de contrebalancer les contraintes inhérentes aux délais postaux mais aussi aux décalages horaires entre les outres mers et la métropole, qui allongent en pratique les diverses démarches menées auprès de la Cour en préparation du dépôt d’un appel.
En supprimant ce délai de distance, les demandeurs/euses en Guyane n’ont plus que 15 jours pour saisir la CNDA, excluant de fait de ce droit au recours toutes les personnes isolées et non francophones.
Au nom d’une efficacité de traitement administratif, ce décret pose un délai de traitement en 15 jours maximum par l’OFPRA, alors que celui-ci est à l’heure actuelle d’environ 3,5 mois. Cette accélération de l’instruction des demandes d’asile, critiquée par les agents de l’OFPRA eux-mêmes dans le cadre d’une grève nationale en février dernier, pourrait ne plus mettre ces derniers en capacité d’assurer un examen de qualité des demandes d’asile.
Par ces mesures, la demande d’asile devient une véritable course d’obstacles et un contre la montre, dans un contexte où l’accompagnement institutionnel des personnes en quête d’asile est particulièrement défaillant.
Avec ce décret, l’objectif affiché par les autorités est d’étendre ces dispositions à l’ensemble du territoire français. Comme par le passé, la particularité du contexte guyanais est prise en prétexte à l’introduction de mesures dérogeant au droit commun pour ainsi fabriquer de nouvelles normes qui vont accentuer la maltraitance institutionnelle dont sont victimes les personnes réfugiées et migrantes en France.
Ce décret constitue une nouvelle attaque à l’exercice du droit d’asile et marque un nouveau désengagement de l’Etat vis-à-vis de l’accueil des personnes réfugié.e.s.
[1] Voir le dossier de décryptage du projet de loi réalisé par La Cimade.
[2] Voir le communiqué de presse inter associatif publié sur le sujet le 13 novembre 2013.
Auteur: Région Outre-Mer
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