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En novembre 2024, quarante ans après l'ouverture des premiers centres de rétention ...
Cet été, la France accueillera les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris avec pour slogan “Ouvrons grand les jeux”. Dans un contexte déjà critique pour les droits des personnes migrantes, et alors que les résultats des élections européennes et le score historique de l’extrême droite aux élections législatives font craindre une dégradation massive de leur situation, La Cimade alerte sur les risques de précarisation et d’exclusion que font peser l’organisation de cet événement sur ces personnes.
Alors que la France s’apprête à accueillir des milliers de touristes pour les Jeux olympiques et paralympiques, elle poursuit pourtant, au sein de l’Union européenne, une politique de fermeture et de rejet aux frontières de l’Europe contre celles et ceux qu’elle considère comme “indésirables”. Des moyens considérables sont consacrés à l’édification de barrières physiques, juridiques et technologiques qui ne font qu’accroitre les risques sur les routes migratoires au détriment de la protection de la dignité et des droits fondamentaux des personnes en exil.
Ces politiques sont basées sur l’idée que seules certaines personnes et nationalités seraient légitimes à se déplacer, en fonction des besoins exprimés par certains Etats. Les distinctions, entre “bienvenu” et “indésirable”, reposent sur des rapports de domination économiques et politiques internationaux et une perception utilitariste des mobilités humaines. Cette approche discriminatoire des mobilités n’est rendue que plus visible pendant cette période des Jeux.
Afin de garantir une égalité de traitement de toutes les personnes, La Cimade défend la liberté de circulation à l’échelle mondiale, telle que proclamée par l’article 13 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme.
Principes cardinaux de l’action sociale, le droit à l’hébergement d’urgence et l’inconditionnalité de la mise à l’abri de toute personne en détresse sont reconnus comme libertés fondamentales. Pourtant des milliers de personnes, hommes, femmes et enfants dorment chaque à jour à la rue et parmi elles une majorité de personnes migrantes.
Ce phénomène s’accentue à l’approche des Jeux olympiques. De mai 2023 à mai 2024, les évacuations des squats, bidonvilles et campements ont augmenté de 40% par rapport à la période 2021-2022 selon le collectif « Le Revers de la Médaille » qui rassemble 80 associations d’aide aux personnes démunies, dont La Cimade. En cause, la volonté d’invisibiliser les personnes sans domicile fixe pour donner une image positive de Paris et des villes accueillants les Jeux olympiques, aux plus de 15 millions de visiteurs et visiteuses attendu.e.s. Il s’agit donc de disperser les personnes en situation de grande précarité, de les éloigner de Paris en les envoyant dans d’autres régions, sans que des moyens ou des places d’hébergement supplémentaires ne leur aient été alloués. Selon le collectif, les propositions de relogement, comme dans des centres d’hébergement, sont passées de 64 % l’année dernière à 35% actuellement. Une situation dénoncée en avril par le rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à un logement digne, Balakrishnan Rajagopal.
Il n’est pas acceptable que les Jeux olympiques qui portent notamment des valeurs de respect et d’égalité soient l’occasion de creuser les inégalités et d’exclure encore davantage les plus fragiles, dont les personnes migrantes. La Cimade revendique un droit au logement et à l’hébergement pour toutes et tous.
Lire le rapport “1 an de nettoyage social avant les JOP 2024”du collectif Le Revers de la Médaille
Les manifestations internationales, et en particulier les événements sportifs peuvent entraîner une augmentation du marché pour les réseaux de traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle, notamment de jeunes filles mineures. Il s’agit de personnes, le plus souvent étrangères, qui sont recrutées, déplacées voire hébergées en vue de les exploiter sexuellement et d’en tirer des profits.
Pendant les JO, la France accueillera des milliers de visiteurs et donc un possible plus grand nombre de « clients » potentiels, dans un contexte festif.
La Cimade rappelle que la France est signataire de la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains et se doit d’assurer la protection des victimes de traite, dont l’accès à un titre de séjour pour les personnes étrangères sans-papiers.
Lire le communiqué du Collectif contre la traite des êtres humains
L’absence de possibilités de migration sûre et légale et la demande générale de main-d’œuvre bon marché pour réaliser les travaux nécessaires à l’organisation des Jeux olympiques en France dans des délais “courts” exposent de nombreuses personnes migrantes à un risque d’exploitation et d’abus. Les entreprises utilisent tous les moyens légaux ou illégaux pour livrer dans les temps. Des ouvriers sans-papiers ont ainsi travaillé sur les chantiers des sites olympiques, et notamment au village olympique, sans contrat de travail, fiches de paie, congés ou encore heures supplémentaires payées.
La Cimade demande le respect effectif des règles du droit du travail dès lors qu’une personne est employée, quelle que soit sa nationalité ou sa situation administrative.
Des pans entiers de l’économie française reposent sur les travailleurs et travailleuses sans-papiers : le bâtiment, la restauration, le nettoyage, l’agriculture, l’aide à la personne… Pourtant elles ne parviennent pas à obtenir un titre de séjour les autorisant à vivre et à travailler légalement en France. Les lois sont en effet très restrictives, les procédures sont longues, complexes et dissuasives et les pratiques des administrations hétérogènes, voire pour certaines illégales. Autant d’obstacles qui freinent les possibilités de régularisation. La loi sur l’asile et l’immigration du 26 janvier 2024 qui prévoit des possibilités de régularisation par le travail n’aura que peu d’incidences sur cette situation, notamment parce que la liste des métiers concernés est extrêmement limitée.
L’organisation des Jeux olympiques augmente les besoins de main-d’œuvre et le recours à des personnes sans-papiers, en toute illégalité. Bien que cette situation soit parfaitement connue des pouvoirs publics, rien n’est prévu pour permettre à ces personnes qui contribuent activement à la société française de sortir de la précarité et d’y mener une vie sereine, grâce à la régularisation de leur situation administrative.
La Cimade revendique l’égalité des droits et demande la régularisation large et durable de toutes les personnes sans-papiers, par la délivrance d’un titre de séjour unique et stable, autorisant à travailler.
Années après années, les lois immigration s’empilent. Elles n’ont qu’un objectif : tout faire pour empêcher les personnes migrantes d’entrer et tout faire pour les expulser si elles ont (malgré tout) réussi à rentrer. La même logique s’observe du côté des Jeux olympiques, avec son cortège de mesures sécuritaires (augmentation des contrôles et des audiences de comparution immédiate, vidéosurveillance algorithmique, utilisation de drones, etc.) destinées à éloigner ces “indésirables”.
Les jeux vont donc entraîner une suractivité policière, judiciaire et in fine, ce sont les prisons, déjà à bout de souffle, qui vont enfermer les personnes les plus vulnérables.
Mettre fin à cette politique, notamment en supprimant les délits spécifiques aux personnes étrangères relève d’un enjeu de justice sociale et d’une logique d’égalité des droits.
Lire le rapport « Etranger∙e∙s en prison : Surveiller, punir et expulser »
Partout en Europe, les politiques de criminalisation de la migration se sont développées et ont amené à la multiplication des procédures et des lieux d’enfermement spécifiques aux personnes migrantes. Plus de 100 000 personnes sont enfermées chaque année en Europe pour le simple fait d’être étrangères, dont près de 47 000 en 2023 seulement en France. Alors que la loi prévoit que la rétention administrative doit rester exceptionnelle, la France enferme à tour de bras sans prendre en compte la situation individuelle des personnes, leurs craintes, leur situation familiale, leur santé, leur vulnérabilité, leur vie personnelle. Les conséquences pour la santé physique et mentale des personnes ainsi que pour leur vie privée et familiale sont dramatiques et ne font que s’aggraver alors que les conditions d’enfermement ne cessent de se dégrader et que les violations des droits se multiplient.
Pendant les compétitions, le phénomène va s’intensifier en raison de la multiplication des contrôles policiers et ainsi de la multiplication des interpellations et de l’enfermement en rétention administrative des personnes migrantes.
La Cimade revendique de mettre fin aux dispositifs d’enfermement spécifiques aux personnes étrangères au profit d’une politique centrée sur l’accueil et le respect des droits humains.
Lire le Rapport 2023 sur les centres et locaux de rétention administrative
Depuis plus d’une décennie, les lois en matière d’immigration s’empilent et à chaque réforme, les droits des personnes étrangères se réduisent drastiquement. Les réformes successives ont mis en place une « machine à expulser » qui ne fait que fabriquer des « indésirables ». Les politiques migratoires font primer la logique du tri et du rejet des personnes étrangères, au mépris de leurs droits fondamentaux. L’administration française prononce aveuglément plus de 100 000 nouvelles mesures d’expulsion chaque année, dont un dixième sont réellement exécutées. Celles que l’administration n’arrive pas à expulser sont abandonnées à une vie d’exclusion en France.
Les Jeux olympiques et paralympiques de Paris vont aggraver ce phénomène, en multipliant les contrôles d’identité, les interpellations et les tentatives d’expulsion de personnes migrantes qui ont pourtant, pour nombre d’entre elles, construit leur vie en France ou y ont créé des liens privés ou familiaux.
Il est urgent de mettre fin à cette politique du chiffre dévastatrice et de promouvoir l’accueil et l’inclusion pour une société juste et durable.
Afin de sensibiliser le grand public à la situation des personnes exilées en cette période de Jeux Olympiques, La Cimade a lancé des opérations de collage de stickers dans l’espace public pour interpeller les passant.e.s et faire entendre ses revendications.
Auteur: Service communication
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