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Communiqué de l’Observatoire de l’enfermement des étrangers dont La Cimade fait partie.
Dès le 18 mars 2020, l’Observatoire de l’enfermement des étrangers (OEE)[1] appelait le gouvernement à faire immédiatement cesser l’enfermement des personnes étrangères retenues dans les centres et locaux de rétention administrative, dans les zones d’attente et au poste de police de Menton pont Saint-Louis. Il soulignait déjà que leur libération s’imposait dans le contexte de lutte contre la pandémie du Covid 19 : d’une part, parce que la fermeture des frontières et la mise à l’arrêt du trafic aérien privent la rétention de sa justification – expulser les étranger.es –, d’autre part parce que ces lieux de privation de liberté sont propices à la propagation rapide du virus[2].
Dans de nombreux cas, les juges chargé·es de vérifier les conditions d’enfermement des personnes retenues ont précisément refusé, pour ces deux raisons, de les maintenir en rétention[3].
Le gouvernement est resté sourd à ces alertes : de nombreuses personnes ont continué d’être retenues ou placées dans des CRA, le plus souvent après avoir été transférées depuis un établissement pénitentiaire où elles avaient définitivement purgé leur peine. C’est pourquoi plusieurs organisations membres de l’OEE, accompagnées du Conseil national des barreaux (CNB), ont saisi le Conseil d’État d’une requête en référé liberté afin de voir ordonner la fermeture des centres de rétention administrative (CRA).
Dans son ordonnance du 27 mars, le Conseil d’État a rejeté cette requête. Accordant un crédit inconditionnel aux affirmations du ministre de l’intérieur, il a considéré :
Les informations et témoignages recueillis depuis lors sur la situation dans les CRA montrent que le Conseil d’État a entériné le principe d’une « protection au rabais pour les étranger.es »[5]. Les retenu·es aux CRA de Oissel et du Mesnil-Amelot, les représentant·es des associations intervenant au CRA de Vincennes ou de soutien aux personnes qui y sont retenues, les député·es et élu·es qui ont visité les CRA de Cornebarrieu et du Mesnil-Amelot[6], tous et toutes apportent un démenti formel aux assurances du ministre et établissent clairement :
Dans son ordonnance du 27 mars, le Conseil d’État a également justifié l’inconcevable refus du gouvernement de fermer les centres de rétention au motif que l’administration avait pu procéder, dans la période récente, à des expulsions « en dépit des restrictions mises par de nombreux États à l’entrée sur leur territoire et de la très forte diminution des transports aériens ». Depuis lors et selon nos informations, aucune expulsion n’a été réalisée – à l’exception d’une expulsion vers le Brésil … depuis la Guyane – faute de vols disponibles ou d’accord des pays de renvoi. Que les personnes encore retenues dans les CRA soient, ou non, d’ancien·nes détenu·es n’y changera rien : leur expulsion reste impossible et leur rétention privée de base légale.
Les lettres ouvertes, les pétitions, les interpellations directes des préfets se multiplient. Les personnes retenues, excédées et désespérées, s’organisent pour lutter collectivement contre cette aberration. Il faut se rendre à l’évidence : l’obstination du gouvernement défie tous les principes aussi bien que le bon sens. Ni les centres et locaux de rétention ni les zones d’attente, ne sont des centres de confinement. En y maintenant coûte que coûte et côte à côte, dans des conditions matérielles honteuses, des étranger·es qu’il ne pourra pas expulser, le personnel assurant les services de livraison et d’entretien des locaux et des effectifs de police qui vont et viennent quotidiennement – tou·tes et tous privé·es des dispositifs de protection qu’il recommande ailleurs – il brave les principes de précaution sanitaire élémentaires et expose toutes ces personnes à des risques de contamination majeurs.
C’est ce qu’a déjà admis, le 15 avril, le juge des référés du tribunal administratif de Paris en estimant que « le préfet de police […] entretient le foyer de contamination qui a été récemment identifié au sein de ce centre, et méconnaît de ce fait les impératifs de santé publique qui s’imposent à lui en vertu de l’état de catastrophe sanitaire mettant en péril la santé de la population ».
L’état d’urgence sanitaire doit agir comme un révélateur : les CRA et autres lieux où sont parqués les étranger·es, sont incompatibles avec le respect des droits. Sans plus attendre, leur fermeture s’impose. Mais au-delà de la période de crise que nous traversons, qui en démontre de façon criante le caractère discriminatoire et mortifère, il faut en finir avec l’enfermement administratif des étranger·es.
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[1] Organisations membres de l’OEE : ANAFE, Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE), COMEDE, Droits d’urgence, FASTI, Genepi, GISTI, La Cimade, Ligue des droits de l’homme, MRAP, Observatoire citoyen du CRA de Palaiseau, Syndicat de la magistrature (SM), Syndicat des avocats de France (SAF).
[2] OEE, Face à la crise sanitaire, l’enfermement administratif des personnes étrangères doit immédiatement cesser, 18 mars 2020.
[3] Cour d’appel de Rouen, 31 mars 2020 : « la privation de liberté ne peut perdurer sans perspective minimum d’éloignement. Au surplus, M. X se trouve en France où le virus est actif et la pandémie n’a pas atteint son pic ; il est placé en rétention depuis le 23 mars 2020 après avoir été détenu depuis le 27 février 2020 en maison d’arrêt où les mesures contre la contamination ne sont pas optimales ».
[4] Conseil d’État, ordonnance du 27 mars 2020, Gisti et autres, N° 439720.
[5] ADDE, CIMADE, GISTI, SAF et CNB, Le Conseil d’État refuse la fermeture des centres de rétention : une protection au rabais pour les étrangers, 30 mars 2020.
[6] Voir le détail de leurs témoignages et déclarations en annexe.
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Auteur: Service communication
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