Ecoutez-moi, j’ai quelque chose à dire.
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Tribune commune : Les représentants des principales organisations de défense des droits humains et de syndicats de journalistes et de magistrats dénoncent, dans une tribune au « Monde », le traitement que la France continue de réserver aux citoyens afghans, qu’ils soient déjà arrivés en Europe ou en attente d’une évacuation.
C’était en plein mois d’août. Kaboul venait de tomber entre les mains des talibans. Cela a commencé par quelques coups de fil : des collègues, des amis nous demandaient d’aider un de leurs proches, confrères ou consœurs afghans, de les évacuer au plus vite d’Afghanistan, avant que les troupes américaines se retirent, le31 août.
Alors nous nous sommes mobilisés. Nous, c’est-à-dire des artistes, des journalistes, des avocats, des chercheurs, des magistrats, des défenseurs des droits humains regroupés dans des associations ou des syndicats basés en France. Chacun de notre côté, nous avons travaillé sans relâche, souvent avec peu d’effectifs et de moyens, pour identifier et établir des listes des personnes en danger qui nous contactaient, désespérées. Ces listes, nous les avons remises au gouvernement français, pour demander une évacuation, le soutien et l’aide de la France.
Une aide sur laquelle certains d’entre nous ont compté au premier abord, forts des mots que vous avez prononcés, monsieur le président, lors de votre allocution du 16 août : « De nombreux Afghans, défenseurs des droits, artistes, journalistes, militants, sont aujourd’hui menacés en raison de leur engagement. Nous les aiderons parce que c’est l’honneur de la France d’être aux côtés de celles et ceux qui partagent nos valeurs. »
Aujourd’hui, trois mois après votre discours, qu’en est-il de cette promesse pour « l’honneur de la France » ?
Car depuis le 31 août, malgré l’horreur, malgré l’urgence, seule une poignée de citoyens afghans a été évacuée par la France. Un nombre dérisoire malgré les engagements pris…
Car depuis le 31 août, malgré l’horreur, malgré l’urgence, notre pays continue de réserver aux citoyens afghans le même traitement qu’auparavant, quitte à bafouer ses engagements internationaux.
Pourchassés, placés en rétention, menacés d’expulsion
A 7 000 kilomètres de Kaboul et de Kandahar, ici, en France, des Afghans continuent d’être pourchassés, placés en rétention, menacés d’expulsion. Pour quoi ? Pour être remis entre les mains des talibans, un régime non reconnu par la France ? D’autres continuent d’être refoulés à nos frontières ou attendent la délivrance de visas, « gelée » parfois depuis plus d’un an. Des visas auxquels leurs proches ont pourtant droit au titre du rapprochement familial !
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Il y a longtemps que ces pratiques ruinent la réputation de terre d’asile et d’accueil de la France. Aussi, face à l’horreur, face à l’urgence, un changement de politique s’impose. Vous l’avez dit vous-même le 16 août : « Nos liens d’amitié sont anciens et profonds » avec le peuple afghan. Aujourd’hui, ce peuple attend de la France autre chose qu’inaction et dérobade.
Bien sûr, les conditions d’évacuation sont difficiles. Bien sûr, tous les Afghans ne s’exileront pas. Mais ceux et celles, parmi les plus en danger, que nous représentons doivent être protégés : ils sont dans la ligne de mire des talibans.
A quand le respect de la dignité, de nos lois ?
Certains ont travaillé pendant des décennies pour informer au sujet des talibans. D’autres ont dénoncé leurs agissements, les ont portés devant la justice ou les ont condamnés. Certains symbolisent tout ce que ce régime rejette : les arts, les libertés, la culture, la démocratie, l’Etat de droit. D’autres font partie de minorités, persécutées, exclues de la société conçue par les talibans.
Aujourd’hui, parmi ceux et celles qui lancent un appel à la France, certains sont activement recherchés, leurs noms inscrits sur des listes noires. D’autres sont victimes d’agressions et d’exactions quotidiennes. Tous et toutes sont des cibles, vus comme des traîtres, des espions ou des ennemis. Tous et toutes sont pris au piège des talibans, les femmes étant doublement visées.
Que fait la France pour leur venir en aide ? A quand la mise en place d’une procédure d’évacuation claire et la délivrance rapide de visas humanitaires ? A quand le respect du droit au rapprochement familial, l’arrêt des placements en rétention et des expulsions ? A quand le respect de la dignité, de nos lois, de nos engagements internationaux ? A quand l’arrêt du double langage ?
Y a-t-il une réelle volonté politique de mettre en œuvre tous les moyens – certes complexes mais possibles – pour évacuer et accueillir dignement ces personnes en danger ?
Monsieur le président, le 16 août, vous avez déclaré : « Un tournant historique est à l’œuvre ». Quel rôle la France, pays des droits humains, réputée pour sa tradition d’accueil et d’asile, veut-elle jouer dans ce tournant ? Va-t-elle être à la hauteur de l’enjeu de l’histoire, ou va-t-elle se contenter de beaux discours ?
Vous avez le devoir, monsieur le président de la République, de respecter vos engagements. Vis-à-vis des principes que vous affirmez défendre. Vis-à-vis des Afghans. Et vis-à-vis des Français qui vous ont écouté.
Le contraire serait une honte et une indignité.
Siddiq Barmak, réalisateur afghan ; Anthony Bellanger, secrétaire général de la Fédération internationale des journalistes ; Cécile Coudriou, présidente d’Amnesty International France ; Nordine Drici, président de Planète réfugiés – Droits de l’homme ; Katia Dubreuil, présidente du Syndicat de la magistrature ; Bernadette Forhan, présidente de l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture France ; Jérôme Gavaudan, président du Conseil national des barreaux ; Framorze Haidar, président de l’association Pamir ; Shukria Haidar, présidente de l’association Negar – Soutien aux femmes d’Afghanistan ; Reza Jafari, président de l’association Enfants d’Afghanistan et d’ailleurs ; Michèle Loup, présidente de l’association ECVF – Elu·es contre les violences faites aux femmes ; David Malazoué, coprésident de SOS homophobie ; Mohsen Makhmalbaf, réalisateur iranien ; Marin Marx-Gandebeuf, coordinateur général de Watizat ; Henry Masson, président de la Cimade ; Ariane Mnouchkine, directrice du Théâtre du Soleil ; Céline Parisot, présidente de l’Union syndicale des magistrats ; Emmanuel Poupard, premier secrétaire général du Syndicat national des journalistes ; Atiq Rahimi, cinéaste et écrivain franco-afghan ; Vanina Rochiccioli, présidente du Groupe d’information et de soutien des immigré·e·s ; Malik Salemkour, président de la Ligue des droits de l’homme ; Flor Tercero, présidente de l’association Avocats pour la défense des droits des étrangers.
Auteur: Service communication
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