La Cimade en région AuRa se mobilise pour la marche des migrant.e.s
À l’occasion de la Journée internationale des migrant·e·s, plus de 230 organisations ...
L’avant projet de loi prévoit la possibilité de création de lieux baptisés « France-Asile « où en plus des services du préfet et de l’OFII, des agents de l’OFPRA seraient présents et où des missions foraines pourraient se tenir.
Lors du débat sur la politique d’immigration, le 6 décembre 2022, le Gouvernement a présenté succinctement les mesures législatives envisagées pour réformer encore une fois le dispositif d’asile. Le texte soumis pour avis au Conseil d’Etat le 19 décembre, a également fait surface.
L’avant projet de loi prévoit la possibilité de création de lieux baptisés « France-Asile « où en plus des services du préfet et de l’OFII, des agents de l’OFPRA seraient présents et où des missions foraines pourraient se tenir. Cette mesure a pour objectif de supprimer le délai d’introduction d’une demande d’asile auprès de l’OFPRA et par les missions foraines de réduire le délai d’instruction de celle-ci.
Avant la circulaire règlementaire du Premier ministre du 17 mai 1985, aucune disposition n’organisait le dépôt d’une demande d’asile auprès de l’OFPRA. Les personnes pouvaient se rendre directement auprès de lui, remplir un formulaire et sortir avec un « certificat de dépôt » qui leur permettait de se tourner vers la préfecture pour obtenir un récépissé de six mois avec autorisation de travail et vers les ASSEDIC pour toucher l’allocation d’insertion.
Parce qu’il y a eu quelques abus, longuement décrits par les rapports d’activité de l’OFPRA de l’époque, il a été décidé de faire précéder l’enregistrement OPFRA d’un passage auprès du préfet pour la délivrance ou non, d’une autorisation provisoire de séjour d’un mois, pendant lequel la personne devait adresser le formulaire de demande d’asile remis par les services préfectoraux (mais aussi par les associations). La circulaire prévoyait aussi des cas de procédure sans autorisation (procédures prioritaires) où le préfet envoyait le formulaire. En 1993, ce passage par la préfet est devenu obligatoire et l’APS est devenue une pièce exigée pour que l’OFPRA enregistre la demande. Avec le certificat de dépôt, les personnes, admises au séjour, pouvaient solliciter l’allocation d’insertion (une allocation d’attente sans base réglementaire étant versée par le SSAE dans l’attente du versement).
En 2003-2004, les exigences se sont renforcées puisque le formulaire devait être obligatoirement rédigé en français et adressé dans un délai de vingt-et jours. L’OFPRA a été tenu de refuser l’enregistrement des demandes arrivées incomplètes ou hors délai et un contentieux nouveau s’est crée au tribunal administratif de Melun et d’ailleurs, parce que les préfets avaient consigne de notifier des OQT et des refus de séjour après ce refus.
Avec la transposition des directives 2005/85/CE puis 2013/32/UE qui ne connaissent pas la notion de recevabilité formelle d’une demande, il était clair que ce régime ne pouvait pas survivre. Pourtant celle n’a pas été le cas, puisque le délai a été maintenu. A la place du refus d’enregistrement, la loi de 2015 a prévu un régime de clôture d’instruction pour demande non déposée dans le délai, avec la possibilité d’une réouverture et un régime contentieux spécifique, le TA de Melun étant compétent pour connaitre le refus de réouverture de la demande par l’OFPRA et non la clôture elle-même. Ont été maintenues au départ l’obligation de revenir à la préfecture au bout d’un mois pour vérifier si la demande a été introduite qui conditionnait l’accès à l’ADA, sur la base fragile d’une instruction du 1er décembre 2015, ce qui explique le délai de carence pour percevoir cette allocation de 30 à 45 jours.
Pour diminuer le nombre de passages en préfecture et par un simple arrêté de mai 2020, les attestations de demandes d’asile sont délivrées pour dix mois si la procédure est normale et de six mois si elle est accélérée, la vérification de l’introduction de la demande se faisant par la consultation du fichier INEREC.
Le formulaire OFPRA permet au demandeur de préciser son état-civil et familial (et ainsi corriger d’éventuelles erreurs commises par les SPADA puis par les GUDA sur la composition familiale du candidat réfugié), son itinéraire (quelques éléments socio-culturels et les voies d’arrivée) son éventuelle vulnérabilité nécessitant une adaptation des conditions entretiens et surtout son récit de vie et les pièces produites (passeport, documents divers).
L’utilité du récit écrit (en français) est un sujet de controverse parmi les associations ou même parmi l’OFPRA. Essayons d’esquisser les grandes lignes des thèses:
Pour
Pour le demandeur d’asile, le récit écrit oblige à structurer son récit (en général de façon chronologique) pour mettre en valeur les persécutions subies, parfois pour éviter d’avoir à réveiller des souvenirs traumatisants lors de l’entretien et ainsi faire valoir ces craintes en cas de retour. Les associations qui, pour les non-francophones, sont le passage obligatoire, peuvent les aider à structurer ce récit.
Pour l’OFPRA, il permet d’en connaitre un peu plus du demandeur et ainsi adapter les conditions d’examen, en prévoyant une plage horaire plus importante pour l’entretien personnel ou en adaptant la procédure appliquée (pour les vulnérabilités dites subjectives comme les persécutions liées au genre, les victimes de torture ou de la traite des êtres humains).
Ces éléments plaident pour le maintien d’une question sur les motifs de la demande.
Contre
Pour d’autres, dont l’auteur de ces lignes, il n’est qu’un vestige d’un temps où l’OFPRA ne convoquait les demandeurs d’asile que s’ils le ‘méritaient’ (avant 2003) et omet les nombreuses difficultés rencontrées pour sa rédaction.
Pour le demandeur d’asile, comme ce récit est obligatoirement rédigé en français, il faut passer par un intermédiaire qui est une structure de premier accueil, une association, un e compatriote ou une officine d’écrivain public et de traduction.
Parmi les prestations que doivent fournir les SPADA, l’aide au complément du dossier OFPRA figurent parmi les indicateurs principaux. Les statistiques pour 2021 ne sont pas partout disponibles mais trois opérateurs les publient dans leur rapport d’activité : CASP, Forum réfugiés et FTDA. Des données complémentaires ont été communiquées à la Cimade par COALLIA.
La carte montre que seulement la moitié des nouveaux domiciliés reçoivent cette aide avec des grandes disparités, liées en partie à plus ou moins grande part des Dublinés (qui ne peuvent saisir l’OFPRA immédiatement). Ainsi les SPADA gérés par FTDA en Ile de France ont un taux très faible de complément en raison de l’importance dans la région des Dublinés (50% des demandes) qui contraste avec celui du CASP (qui est lié en partie à la requalification de familles Dublinées). Dans d’autres régions, plus la SPADA est petite, plus le taux de complément du dossier OFPRA est important.
Les associations qui ne sont pas des prestataires de l’OFII reçoivent beaucoup moins de demandeurs d’asile qui demandent de l’aide pour remplir le formulaire. Où vont les autres demandeurs d’asile? Certaines prennent contact directement avec des avocats qui constituent des dossiers complets mais il faut pouvoir payer leurs honoraires. D’autres font confiance à des proches ou d’autres personnes non désintéressées qui leur « vendent » une histoire à raconter et qui passerait à l’OFPRA (en russe, elles sont baptisées légenda). Pour certaines nationalités, elles leur conseillent de l’apprendre par coeur.
Du point de vue de l’OFPRA, depuis 2019, les divisions géographiques n’ont plus la main sur la programmation des entretiens. En effet, les demandeurs indiquent dès le GUDA, la langue qu’ils comprennent et c’est un logiciel géré par la DACIM qui programme en fonction des disponibilités des officiers de protection et des interprètes, la convocation à un entretien personnel.
D’un point de vue juridique, la coopération du demandeur pour présenter les éléments de sa demande qui est mentionnée à l’article L. 531-5 du CESEDA, indique l’obligation pour le demandeur de présenter ‘aussi rapidement que possible, tous les éléments nécessaires pour étayer sa demande d’asile.
La prise en compte du récit est très variable selon la méthode d’entretien qu’utilisent les officiers de protection (OP). Certain·e·s lisent l’intégralité des déclarations pour ne poser que de questions de précision ou s’iels ont l’impression qu’il manque une partie des déclarations. D’autres vont jeter un oeil au récit, juste avant l’entretien, pour avoir une idée de la problématique pour mener un entretien semi directif en ayant sous les yeux, le récit scanné, d’autres enfin vont faire un entretien non directif qui reprend l’intégralité des questions (état-civil, et récit) sans jeter un oeil sur ce récit.
Plusieurs centaines d’observations lors des entretiens de la Cimade montrent que la deuxième méthode est la plus fréquente mais qu’il est possible de présenter les éléments de la demande d’asile uniquement à cet entretien (notamment en rétention où le délai est très court, parce que l’histoire n’est pas celle de la personne ou parce que le demandeur ne souhaitait tout raconter par écrit). La véritable contrainte est celle du temps puisque pour pouvoir respecter l’objectif de performance fixé par la loi de finances, chaque OP doit prendre en moyenne 2 décisions par jour et donc mener deux entretiens plus ou moins longs. Si le récit écrit ne figurait plus dans le formulaire, cela conduirait à des entretiens un peu plus longs et donc diminuerait le nombre d’entretiens menés.
Les situations où le délai est déjà réduit
Quand le délai d’introduction est réduit à peau de chagrin, comme c’est le cas dans les centres de rétention administrative où le délai est de cinq jours, qui est en fait réduit à un ou deux car les personnes sont convoyées vers les tribunaux judiciaires ou administratifs pour la prolongation de la rétention ou l’examen du recours contre la mesure d’éloignement, le complément est sommaire et c’est l’entretien (en visioconférence) qui est essentiel (il se déroule dans des conditions limites au regard de la confidentialité des éléments de demandes, la mauvaise qualité des équipements poussant les OP à mettre le volume au maximum alors que des policiers se trouvent immédiatement à proximité). En zone d’attente, l’entretien est la seule base de l’avis de l’OFPRA.
Dans les deux départements d’outre mer (Guyane et Mayotte avec une option pour la Guadeloupe) où le délai d’introduction est de sept jours, les agents des antennes de l’OFPRA n’exigent pas une « complétude » parfaite car l’entretien personnel est programmé dans la foulée (pour que l’OFPRA statue dans un délai réduit de trois semaines) et les statistiques de l’OFPRA ne montrent pas un grand nombre de clôtures.
Un dernier élément est la dématérialisation généralisée en métropole des courriers OFPRA. Aujourd’hui, il n’est pas nécessaire que la personne soit domiciliée auprès d’un centre ou d’une SPADA pour qu’elle reçoive sa lettre d’introduction, sa convocation et sa décision. S’il faut prévoir un accompagnement pour les personnes victimes de la fracture numérique (via les centres d’hébergement et les SPADA) et maintenir la possibilité pour l’OFPRA de continuer à utiliser le courrier en cas d’impossibilité d’utiliser ce canal, il est peut être temps de simplifier la procédure d’introduction en supprimant du formulaire OFPRA, le récit écrit et ainsi l’obligation de le rédiger dans un délai précis, ce qui n’interdit pas que les documents de voyage ou les « documents probants » soient transmis ultérieurement à l’OFPRA en tout cas, avant la décision de l’OFPRA.
Il est alors simple, sans modification législative, de supprimer complètement l’obligation de remplir un dossier et par la même occasion, le délai d’introduction pour les demandeurs admis à présenter leur demande (c’est une autre affaire pour les Dublinés). Cela évitera de demander aux personnes plusieurs fois des informations similaires.
Le demandeur lorsqu’il se rend à la SPADA, doit présenter les indications prévues par le décret (état-civil, composition familiale, itinéraire et documents s’il en a). Ces informations sont transmises via un formulaire électronique de demande d’asile par la SPADA au GUDA et une convocation est remise. Lors de l’enregistrement, le demandeur doit indiquer la langue qu’il comprend et se voit remettre la clé de son coffre fort électronique où l’OFPRA lui adresse désormais par ce biais, la lettre d’introduction, la convocation et la décision. Aujourd’hui, le préfet informe l’OFPRA de l’enregistrement et remet un formulaire que le demandeur doit adresser accompagné d’une copie de l’attestation (et de l’information sur la procédure accélérée, s’il y a lieu) dans le délai de 21 jours.
On peut imaginer que ces taches soient faites par le préfet et l’OFII. Le préfet transmettrait à l’OFPRA via le système d’information asile (qui n’a pas de base réglementaire) cet enregistrement et le motif d’une accélération ainsi que la langue parlée. L’OFII pourrait évaluer d’éventuelles vulnérabilités qu’il transmet, avec consentement, à l’OFPRA. Avec ces éléments, l’OFPRA pourrait donc dans un très bref délai, adresser la lettre d’introduction et le cas échéant la date de convocation pour un entretien via le coffre fort électronique de l’espace usager.
Si on continue d’exiger d’adresser au préalable des éléments d’information spécifiques à l’OFPRA, on pourrait le faire, après l’introduction, toujours via l’espace usager de en demandant de transmettre les pièces de façon dématérialisée (passeport, « documents probants ») voire de compléter, facultativement, un formulaire simplifié (qui permettrait de corriger les erreurs sur l’état-civil ou l’itinéraire, commises auparavant par les SPADA ou les GUDA).
La seule modification législative serait alors de remplacer les cas de clôtures prévues par l’article L. 531-37 et 1° de L. 531-8 du CESEDA par les cas prévus au 2° et 3° du dernier article.
On peut également s’inspirer des dispositions de l’article R*112-12 du code de service national pour faire que la convocation à un entretien prévue à l’article R.531-11 du code vaille bon de transport ou donne lieu à une indemnité de déplacement pour résoudre la difficulté des personnes ne bénéficiant pas de l’allocation pour demandeur d’asile. Et on peut faire de même la convocation à une audience de la Cour.
Si une simple modification réglementaire permet de supprimer le délai d’introduction, alors pourquoi passer par la loi pour créer des lieux ‘France Asile » ou une partie de la DACIM serait déployé? La question est déjà posée pour les antennes de l’OFPRA en Guyane et à Mayotte.
Cette implantation serait une manière d’écorner l’autonomie de l’OFPRA et son indépendance concernant l’instruction qui est un principe inscrit dans la loi. :
Tout d’abord, juridiquement, tout établissement public déconcentré est placé, selon un décret de mai 2015 sous l’autorité du préfet qui coordonne son action et les fait participer « aux instances de collégialité des chefs des services déconcentrés de l’Etat en région ou dans le département. ». L’OFPRA déconcentré serait donc fortement incité à participer aux différents comités Théodule qui sont prévus par les schémas régionaux d’accueil. Dans le secret de ces réunions, un préfet peut alors lui demander d’instruire un peu plus rapidement toutes ces demandes « manifestement infondées » de personnes qu’il est obligé d’héberger avec l’OFII, afin de prendre rapidement les mesures d’éloignement nécessaires.
On obérait ainsi l’indépendance de l’OFPRA qui est déjà soumis à la pression forte d’accélérer l’instruction (par le ministre et par l’abus statistiquement prouvé des procédures accélérées par les préfets)
Un autre facteur est que pour que cette implantation soit « viable », elle ne peut se faire que dans les ressorts de zone de défense ou celles des cours administratives d’appel (soit à Lille, Strasbourg, Nantes, Bordeaux, Toulouse, Lyon et Marseille). Cela suppose la transformation des guichets uniques en halles régionales d’asile (ou cité régionale de l’asile) accueillant entre 20 et 65 personnes par jour ouvré, si le découpage zonale est privilégiée et entre 30 et 60 si celui des CAA l’est. Même si certains GUDA y sont habitués (en particulier en Ile de France ou plus de 300 personnes sont reçues par jour dans les huit GUDA), cela créé immédiatement une impression de grand nombre qui pourrait influencer les acteurs.
Auteur: Responsable national Asile
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