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Le récit d’une expulsion musclée d’une mère accompagnée de ses enfants de Besançon à Pristina. Avec ses mots, elle nous raconte cette expérience d’une violence inouïe.
Récit de Madame Hana Haradini recueilli par La Cimade de Besançon avec l’aide d’un interprète
Le 1er mars 2016 à 20h, nous sommes rentrés à Saint Jacques comme d’habitude. À 20h30, j’ai entendu frapper fort à la porte de ma chambre et des personnes se sont présentées étant de la police. Elles sont rentrées m’ordonnant immédiatement de récupérer les affaires pour expulsion. J’étais perdue et les policiers ne voulaient pas m’écouter. En plus mon mari n’était pas là. Je voulais leur dire que je souffre des troubles psychologues et que je suis un traitement lourd. Quand ils m’ont ordonnée de préparer les affaires, j’ai failli faire une crise de nerfs comme j’en fais toujours. C’est pour cela que j’avais besoin de mon conjoint Driton Kransiqi, père de mes enfants pour s’occuper de nos enfants Hana et Adi. « C’est contraire à la loi de famille ce que vous faites ! », dis-je au policier. J’ai été choquée car c’est la première fois qu’on vient me séparer de mon conjoint et de force. Résultat, aujourd’hui, il est disparu en France depuis ce soir et moi au Kosovo seule et impuissante.
Quand les policiers m’ont embarquée dans la camionnette, j’ai été envahie par mes larmes et les enfants étaient traumatisés.
À cette situation de crise, l’interprète nommé Shpend y a aussi contribué. Il ne faisait pas correctement son travail. J’ai insisté pour qu’il transmette le message aux policiers sur mon hospitalisation, deux fois de longues durées en psychiatrie au CHU, mais en vain. Au lieu de traduire mes requêtes, il m’a répondu à sa propre manière : « La police sait que vous suivez tous des consultations au cabinet du Dr. Robinet. » J’ai répondu : « Pardon ?! » Je ne connais pas ce docteur. Moi, je suis des soins au CHU de Besançon auprès du psychiatre Dr. Tricot et ma fille Ana auprès du pédopsychiatre Dr. Galdioni. C’est là que j’ai compris qu’ils voulaient tous me manipuler ou alors il y avait un malentendu !
Quand j’ai répondu ceci à l’interprète, il a rougi, il ne s’est pas senti à l’aise. De nouveau, j’ai demandé à la police de ne pas me renvoyer sans mon mari. Il fallait le trouver. Cette fois l’interprète n’a pas traduit. Il m’a juste traduit ce que la police venait de lui dire : « Si à 22h votre conjoint ne se présente pas, nous allons vous accompagner jusqu’à l’aéroport ».
Vers 21h30, nous sommes arrivés au commissariat de police de la Gare d’eau. Il faisait froid. Les policiers m’ont dit d’attendre jusqu’à 22h l’arrivée de mon conjoint. « S’il ne se présente pas, nous vous renvoyons avec les enfants » m’ont-ils précisée. Entre temps, j’ai eu au téléphone M. Hoxha, un ami qui, de son coté comme moi, a essayé de joindre mon conjoint. M. Hoxha connaît bien ma pathologie. Il s’est présenté au commissariat avec Madame Annette Garcia de La Cimade vers 9h45, mais on ne m’avait pas donnée le droit de les voir. J’avais espéré que cette fois au moins ils vont écouter Madame Garcia et mon ami Hoxha. Entre temps, l’interprète qui me demandait de joindre Driton croyait que je parlais à lui. En effet, dès le début, j’avais parlé à M. Hoxha. Peu avant le départ, une des policières est venue me remettre 50 € de la part de M. Hoxha avec son mot signé. Il savait que je n’avais aucun sous sur moi, ni du lait pour mes bébés ! Je n’ai même pas pu récupérer le biberon de mon fils qui est resté à Saint Jacques. En effet, toutes mes affaires sont restées là-bas. Je n’ai pris que la poussette. J’ai été expulsée comme une criminelle.
À 22h05, j’ai été sur la route de Metz avec les policiers. De nouveau, j’ai essayé de joindre mon mari mais en vain ! Je lui ai laissé des messages, je lui ai écrit mais il était injoignable. J’ai commencé à faire des cris, je n’avais pas mon traitement sur moi !
À 1h du matin, je suis arrivé à Metz. J’ai immédiatement pris mes cachets qui n’ont pas eu son effet. J’ai demandé de voir un médecin. La police m’a informée que le lendemain j’allais consulter le médecin sans aucun soucis et m’ont expliquée les droits :
Le droite de demander l’asile,
Le droite d’avoir un avocat, etc.
Ma demande d’asile, je dois la présenter sous un délai de 5 jours. Je me moquais de tout ça ; je voulais juste rejoindre mon conjoint Driton et m’occuper de nos enfants.
Tôt le matin, ils sont venus me chercher pour m’emmener à Strasbourg à l’aéroport. Malheureusement, les droits de demander l’asile et de voir un médecin venaient de tomber à l’eau. Ce n’était pas vrai ce qu’on m’avait racontée la nuit précédente. Ils m’ont dit : « Vous allez voir le médecin à l’aéroport. »
Arrivée à l’aéroport, j’attendais de voir le médecin. Et 10 minutes se sont écoulées quand la police m’a ordonnée de monter dans l’avion à destination du Kosovo. J’ai refusé de monter, j’ai été en larmes, j’ai crié pour voir le médecin ; la peur m’était rentrée dans le ventre. C’est en ce moment qu’ils m’ont pris les enfants, les ont fait monter ; moi, ils m’ont menottée la jambe droite et les mains. Ma fille Hana hurlait sans cesse ! Elle était terrifiée de me voir ainsi ! Je précise que quand elle pleure beaucoup, elle perd connaissance. Voilà pourquoi elle était suivie régulièrement par le pédopsychiatre. Au lieu de rencontrer le médecin et de me faire réunir avec mon conjoint, ils m’ont manipulée. J’ai été victime de leur ruse. Ils ont déchiré ma famille. Je leur ai priés de me laisser en pleurs. J’avais une adresse où retourner en France.
Une fois l’avion décollé où j’ai été la seule passagère avec mes deux enfants et les six policiers, ils m’ont enlevée les menottes car Hana n’arrêtait pas de pleurer. Je ne pouvais pas la prendre dans mes bras pour la calmer. J’ai été mal dans cet avion vide. Je me sentais comme la criminelle la plus horrible du monde. Mais pourquoi cela m’est arrivé en présence de mes enfants ? Qu’ai-je fait pour mériter cela ? Je vais être sincère : la France m’a offerte un court séjour, des soins dont je suis dépendante en permanence et je l’en remercie. Mais, ce jour-là tout a été détruit ! Ils m’ont séparée de mon conjoint et n’ont vraiment pas voulu tenir compte de mon état de santé fragile. Si j’avais été bien dans ma peau, je me débrouillerais, mais ce n’est pas le cas. Mes médecins savent très bien que je dois être assistée par une personne la plupart du temps.
Peu avant l’atterrissage à Pristina, ils m’ont remise les menottes. Ensuite, ils me les ont enlevées pour me présenter à la police kosovare. À l’aéroport, j’étais dans la nature, dans un no man’s land. Sans aucun contact, sans aucune possibilité d’informer quelqu’un pour venir chercher mes deux enfants en bas âge et moi, sans argent et souffrante ! Je cherche toujours à savoir pourquoi ceci est m’est arrivée à moi et à mes enfants ? Pourquoi devrais-je subir cette violence ?
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La famille de Madame Hana Haradini était assignée à résidence. Ce récit vient à nouveau démontrer que cette mesure n’est pas une alternative à l’enfermement en centre de rétention administrative (CRA). C’est une mesure complémentaire pour expulser plus, à moindre droit et à moindre coût, loin du regard citoyen. Sans compter que la famille a tout de même passé une nuit au CRA de Metz avant l’expulsion.
> Pour en savoir plus sur l’assignation à résidence, commander le n°87 de la revue Causes communes, un dossier complet y est consacré.
Photographie : © Célia Bonnin. Une partie de l’hôpital Saint Jacques a été reconverti en hébergement d’urgence, Besançon, novembre 2015.
Auteur: Service communication
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