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La publication du rapport d’activité de l’OFII permet de dresser un bilan pour l’année 2021 et d’esquisser des évolutions paradoxales pour 2022.
Etats des lieux du dispositif national d’accueil après que l’OFII a été enjoint à fournir des indicateurs synthétiques qu’il produit. (mise à jour du 16 novembre 2022)
L’OFII a publié en juillet son rapport d’activité 2021. Depuis trois ans, le rapport et ses annexes ne permettent plus d’avoir une idée précise de la répartition des entrées dans le dispositif par régions ou par nationalités. Pourtant ces chiffres existent et sont transmis chaque mois au ministère de l’intérieur et aux préfets de régions, et il faut s’armer de patience et aller devant la juridiction administrative pendant deux ans pour récupérer des données devenues obsolètes. A l’heure où l’on parle d’open data, l’office fait preuve de résistance.On doit donc se contenter de quelques chiffres clés publiés. Cependant après une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Paris, l’OFII a été contraint de transmettre des données plus détaillées le 5 novembre 2022. voir les données (en tableur)
En ce qui concerne l’Ile de France, l’OFII fait toujours le panégyrique de la plateforme téléphonique dans son rapport d’activité mais sans citer le nombre d’appels traités et de rendez vous donnés alors qu’il les publie chaque jour sur son fil twitter. Pourtant, l’année 2021 a été marquée par une augmentation du nombre de rendez vous donnés et la diminution réelle du délai d’enregistrement après que le Conseil d’Etat a enjoint en juillet 2021, le ministère de l’intérieur de prendre les mesures nécessaires sous astreinte. Une instruction du 27 juillet 2021 (demeurée non publiée) a été prise par le ministère pour augmenter le nombre de rendez vous disponibles dans les GUDA d’Ile de France (328 rendez vous théoriques) et l’OFII a été prié de comptabiliser tous les appels reçus pour mieux adapter ces capacités. Cela a conduit à une augmentation du nombre de rendez-vous distribués de plus de 1 000 par mois.
Selon l’OFII, 104 190 primo-demandeurs ont été enregistrés en 2021, soit une hausse de 26,2% par rapport à l’année 2020. L’ile de France rassemble 47,4% des enregistrements (51% des demandes en métropole), suvie de l’Auvergne Rhône Alpes, du Grand Est et de la Provence Alpes Côtes d’Azur. La demande outremer représente 7% des demandes.
On ne dispose plus de la répartition de ces demandes par procédure et par GUDA (qui a été publiée par l’OFII dans ces rapports 2016, 2017 et 2018) , mais seulement des données globales par mois. Les procédures accélérées représentent 25% des premières demandes et les Dublinés représentent 29% avec une part plus importante en fin d’année. Voir Les Dubliné·e·s sortent (un peu) du brouillard statistique
Si on recoupe les données avec celles du rapport d’activité de l’OFPRA , Les requalifications sont au nombre de 15 000 dont 46% sont examinées selon la procédure accélérée à la demande du préfet, alors que le seul fait d’avoir été Dubliné n’est pas un motif d’accélération. voir la résistible ascension des procédures accélérées
L’année 2021 a été marquée par l’effondrement du nombre de bénéficiaires de l’ADA en cours d’année. Début 2021, leur nombre était de 148 000 à la fin de l’année 79 000 pour une moyenne de 122 136.
Pour expliquer ce phénomène, l’OFII indique que l’augmentation des places permet d’héberger davantage de demandeurs d’asile. Ainsi à la fin de l’année 58% des demandeurs étaient, selon lui, hébergés dans le DNA. Les données plus précises communiquées par l’OFII en novembre remettent en cause ces éléments. En effet, le nombre de demandeurs d’asile hébergées peut être estimé à 58 400 sur les 80 046 occupées. Si on comptabilise toutes le demandes pendantes, ce dispositif accueille donc 40% des personnes.
Si la diminution des demandes pendantes, en raison des moyens renforcés à l’OFPRA et à la CNDA, a conduit à un meilleur taux d’hébergement , les économies réalisées pour les crédits de l’ADA (de 81 millions) sont liées d’une part à la politique de suppression du montant additionnel lorsque les personnes ont indiqué, être hébergées gratuitement . On peut estimer que leur nombre était de 35 000 fin 2021 contre 61 000 en 2020.
Il y a d’autre part l’augmentation assez nette du nombre de demandeurs qui n’ont pas ou plus les conditions matérielles d’accueil parce que le bénéfice leur a été refusé (parce qu’ils ont refusé une orientation vers un hébergement ou vers un région, formulé une demande au-delà de 90 jours de présence en France ou une demande de réexamen), retiré (parce qu’ils sont considérés en fuite dans la procédure Dublin, quitté l’hébergement où ils ont été orientés ou enfreint le règlement du lieu avec ou sans un comportement violent) ou qu’ils n’y ont plus droit (demandeurs d’asile des pays considérés comme sûrs après le rejet OFPRA) . Contre l’évidence, l’OFII ne prétend pas pouvoir faire de statistiques sur ces décisions. Mais leur importance se dessine au travers d’un graphique du rapport d’activité montrant la répartition des bénéficiaires adultes par procédure. Ainsi , la part des Dublinés qui était proche de 21% des bénéficiaires adultes fin 2019 a fortement diminué pour atteindre selon le rapport 12% fin 2021, soit à peine 13 000 bénéficiaires alors que le nombre de Dublinés au cours d’instance était au moins de 50 000.
Elle se dessine également par le nombre de contentieux que doit gérer le service dédié de l’OFII. En 2021, 4 123 recours ont été déposés contre des décisions de l’OFII en la matière. Il se concentrent dans les tribunaux administratifs franciliens (45,1% du total) mais aussi dans le Grand-Est, dans les Pays de la Loire (environ 10%), en Occitanie ou en Auvergne Rhône-Alpes, régions ayant une part importante des demandeurs qui est « Dublinée ».
Il y a là une vraie question concernant les obligations de la France, notamment au regard de la directive accueil qui fixe pour objectif de résultat de fournir des conditions d’accueil à tous les demandeurs d’asile, sauf des exceptions prévues par la directive. En apparence, la France commence à s’en approcher puisque fin 2021, 111 901 personnes bénéficiaient de l’ADA (dont certaines sont des bénéficiaires de la protection internationale ou des déboutées à qui vient d’être notifiée une décision définitive) et 65% étaient hébergées dans le dispositif. Mais si on comptabilise l’ensemble des demandes pendantes, ce taux se réduit à 50% et pour une bonne part, il s’agit de demandeurs qui n’auront plus accès à ces conditions alors même qu’ils vont voir examinée leur demande d’asile par la France.
Les seules statistiques par régions qui sont publiées par le rapport, concernent le nombre moyen d’allocataires et de bénéficiaires de l’ADA ainsi que les montants dépensés. A partir de ces données, on peut reconstituer la part des bénéficiaires qui sont hébergés ou non : l’Ile de France qui ne représente plus que 36% des bénéficiaires (contre 43% en 2020) compte deux tiers de non- hébergés. La région Provence Alpes Côte d’azur compte 40% de non hébergés. Pour les autres régions métropolitaines, la plupart des personnes « bénéficiaires » disposent d’un hébergement.
La vulnérabilité est devenue un élément- clé pour accéder au dispositif national d’accueil ou pour éviter l’interruption du bénéfice des conditions d’accueil. Alors qu’un plan a été lancé fin mai par le ministère de l’intérieur pour améliorer le signalement et la prise en charge des personnes vulnérables et qu’à cette fin, un rendez vous santé a été mis en place dans plusieurs GUDA par l’OFII , le nombre de demande d’avis du médecins de zone de l’OFII est globalement en baisse (4 907 en 2021 contre 5 355 en 2020). La Guinée devance l’Afghanistan et la Géorgie dans le nombre d’avis demandés.
. La première région est le Grand-Est avec près de 16% des entrées contre 13,8% pour l’Ile-de-France et 12,3% pour l’Auvergne-Rhône-Alpes. C’est un des effets de la mise en place du schéma national d’accueil qui oriente des demandeurs d’asile enregistrés en Ile-de-France dans les autres régions.
Les données détaillées permettent de voir que 6 134 Dubliné·e·s sont hébergé·e·s dans le dispositif national d’accueil (plutôt dans les HUDA que dans les PRAHDA alors que ce dispositif a été créé pour améliorer l’accès à l’hébergement). C’est mieux qu’à la fin 2020 où seuls 4 000 étaient hébergées (en partie parce qu’il y a eu plus de requalifications en raison des impossibilités de transférer les personnes, en partie parce que de nombreux refus de conditions matérielles d’accueil ont été notifiés après une déclaration de fuite)
Cela représente 10,4% du nombre estimé de Dubliné·e·s et à peine 8% des places occupées. L’Ile-de-France reste la première région à les accueillir mais le Grand Est et l’AURA sont également des régions comptant un nombre conséquent de Dublinés.
-. Selon le rapport d’activité de l’OFII 40% des réfugiés sont sortis vers un logement, ce qui est stable depuis trois ans. 4 092 personnes seraient sorties vers un CPH et on ignore le nombre de « sorties sèches » sans solution.Contrairement à des documents similaires adressés pour 2018 et 2019, l’OFII n’a pas fourni de données détaillées par régions sur ces modalités de sorties
Le rapport d’activité et ces indicateurs obtenus de haute lutte ne donnent que quelques éléments sur l’état du dispositif fin 2021. La situation a déjà fortement évolué en 2022. Tout d’abord, , le « déstockage » des demandes pendantes à l’OFPRA (puis à la CNDA) commence à porter ses fruits : malgré un nombre de demandes introduites en 2022 au même niveau qu’en 2019 (10 500 demandes par mois), le nombre de décisions est supérieur au flux et le « stock » de dossiers à l’OFPRA qui est monté à 88 000 en octobre 2020, était de 49 207 en décembre 2021, et de 40 405 en juin 2022. Sauf arrivée importante de personnes pouvant accéder directement à l’OFPRA sans passer par les fourches caudines de Dublin, le nombre de demandes pendantes à la fin de l’année devant l’Office devrait être autour de 31 000. De même, le nombre de personnes dont le recours est pendant devant la CNDA, devrait être proche de 35 000 (en comptant les mineurs accompagnants), soit un total de 66 000.
Avec 113 832 places en janvier 2021 et la création retardée de 5 700 places d’ici la fin de l’année 2022 (2 500 places de Cada en métropole, 1 500 places de CAES, 900 places d’HUDA en outre mer, 800 places de CPH) , le dispositif national d’accueil devrait être théoriquement suffisant pour héberger l’ensemble des demandeurs d’asile dont la demande est en cours d’examen à l’OFPRA et à la CNDA, ce qui serait une première dans son histoire. Pourtant ce n’est pas ce qui se dégage des quelques statistiques parcimonieusement rendues publiques par l’OFII.
La forte activité de l’OFPRA et de la CNDA a conduit à prendre près de 140 000 décisions pour le premier et 68 000 pour le second en 2021. Plus de 50 000 décisions favorables ont été prises en 2021 et les premières données de 2022 laissent penser que le nombre sera équivalent. En conséquence, le nombre de réfugiés présents dans les lieux augmente et comme l’OFII a réduit de six à trois mois, la période de séjour autorisé après la décision de protection, le nombre de bénéficiaires de protection internationale (BPI) dit « en présence indue », également. Il était d’environ 7 800 fin 2021 et de 11 000 en mai 2022. Si cette tendance se confirme à la fin de l’année, il y en aura environ 31 000 dans le dispositif dédié aux demandeurs d’asile dont la moitié dit « en présence indue ».
Pour les déboutés, le séjour autorisé n’est que d’un mois et les personnes « en présence indue » représente 90% du total. On peut donc estimer qu’environ 6 700 déboutés étaient présents à la fin de l’année 2021 dont 6 071 en présence indue . En mai 2022, le nombre de déboutés en présence indue représentait 7, 1% du dispositif occupé soit environ 5 700 personnes et si la tendance se confirme, on aurait environ 6 à00 déboutés présents à la fin de l’année. Au total, près de 36 000 places du dispositif dédié aux demandeurs d’asile (CADA, HUDA et PRAHDA) seraient occupées par d’autres publics et le nombre de demandeurs d’asile hébergés qui étaient d’environ de 58 400 fin 2021 serait de 44 000 personnes.
Si la création en cours de 800 places de CPH et la mise en place du programme AGIR peuvent contribuer à réduire le nombre de réfugiés présents dans le dispositif demandeur d’asile, cela ne suffira pas. Comme il n’est pas question de revenir à une période autorisée de six mois pour les réfugiés, ni de créer des places CPH en plus grand nombre ( 1 000 places supplémentaires sont prévues par la loi de finances 2023) le ministre a visiblement demandé aux préfets d’utiliser à plein la procédure de référé mesures utiles pour sortir les personnes « en présence indue », en premier lieu des déboutés. Un relevé des ordonnances de ce type au cours du mois de juillet-août 2022, rendu possible par la mise en ligne des décisions des TA en open data, montre que pas moins de 89 procédures de ce type ont été enclenchées en deux mois avec un taux de satisfaction pour les préfets de 92% (alors que le Conseil d’Etat en comptait 236 pour l’ensemble de l’année 2020). Si en Saone-et-Loire, qui avait inventé cette procédure en 2014, en Gironde ou dans le Finistère elle est faite pour les déboutés dans des délais très brefs, dans les Alpes-Maritimes et en Loire Atlantique, cela concerne des personnes dont la décision définitive est assez ancienne. On y apprend également par certaines ordonnances, que le taux de présence indue est de plus de 44% en Loire Atlantique (934 sur 2 119) et de 33% dans les Hauts-de Seine.
Surtout, cette procédure a été étendue aux réfugiés et aux Dublinés après une décision du 22 mars 2022 du Conseil d’Etat qui a ouvert cette possibilité si la personne ne respecte pas le règlement du lieu. Or celui-ci permet l’exclusion des réfugiés ayant refusé une proposition de logement ou d’hébergement et des personnes ayant perdu les conditions matérielles d’accueil. Par une série d’ordonnances du TA de Cergy du 6 juillet 2022, cette procédure a été appliquée pour des réfugiés hébergés dans un HUDA ayant refusé une offre de logement. Le discours du Président de la République aux préfets le 15 septembre laisse penser que l’orientation de bénéficiaires de la protection vers un logement dans une autre région, notamment via le dispositif mis en place par la DIHAL, pourrait devenir contrainte.
Un autre paradoxe se dégage : le dispositif national d’accueil accueillerait moins de demandeurs d’asile qu’à l’heure actuelle parce que bon nombre d’entre eux seront considérés comme non orientables: en septembre 2022, Eurostat comptait 135 700 demandes pendantes mais le nombre de bénéficiaires des CMA (hors protection temporaire) pouvait être estimé à seulement à 80 000 à 90 000. Parmi eux, il y a des réfugiés ou déboutés qui ont une décision récente et le nombre de demandeurs d’asile peut être estimé à seulement 70 à 80 mille.
Ce nombre s’explique par le grand nombre de demandeurs qui n’ont plus les conditions matérielles d’accueil (ressortissants des pays considérés comme sûrs après le rejet OFPRA, demandeurs de réexamen, personnes ayant refusé une orientation mais surtout Dublinés considérés en fuite). A la fin 2021, on peut estimer le nombre de Dublinés à près de 58 000 mais seulement 15 000 étaient bénéficiaires de l’ADA. Même si leur demande d’asile est requalifiée progressivement et qu’ils peuvent saisir l’OFPRA, il est rare que le bénéfice des conditions matérielles d’accueil leur soit rétabli et ils ne peuvent donc entrer dans le dispositif national d’accueil.
L’augmentation de la part des procédures accélérées pour les demandes introduites à l’OFPRA peut également jouer. En 2021, cela concernait 37% des premières demandes (46% avec les réexamens) et la tendance est la même pour les sept premiers mois de 2022. Or une instruction de 2018 avait demandé de réserver les places de CADA aux procédures normales, le dispositif HUDA PRAHDA aux procédures accélérées et aux Dublinés. Certains préfets de région l’ont même inscrit dans leur schéma régional d’accueil comme celui de Provence. La conjonction de ces éléments conduirait à une situation paradoxale : même si l’OFII et les préfets arrivent à sortir les réfugiés et les déboutés et diminuer leur part dans le dispositif, les places ainsi libérées ne seraient pas nécessairement occupées par des demandeurs d’asile qui ne pourraient y être admis, en raison de la procédure qui leur est appliquée, notamment dans les CADA. D’ores et déjà, certains lieux connaissent un taux d’occupation très en-deçà de l’inamovible chiffre de 97% publié par l’OFII et en Ile de France, des personnes sont orientées à partir d’autres régions, faute de personnes « orientables » et alors que le taux d’occupation est l’un des plus faibles de France.
Auteur: Responsable national Asile
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